{"id":1149,"date":"2020-04-16T08:00:46","date_gmt":"2020-04-16T06:00:46","guid":{"rendered":"https:\/\/www.eren.ch\/barc\/?p=1149"},"modified":"2020-04-16T14:48:31","modified_gmt":"2020-04-16T12:48:31","slug":"henri-alexandre-junod-raconte-par-son-petit-fils","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/www.eren.ch\/barc\/2020\/04\/16\/henri-alexandre-junod-raconte-par-son-petit-fils\/","title":{"rendered":"Henri Alexandre Junod racont\u00e9 par son petit-fils"},"content":{"rendered":"
La parole est donn\u00e9e \u00e0 nos paroissiens qui ont le souhait de partager avec vous ce qui leur tient \u00e0 c\u0153ur.
\nEt c’est Olivier Junod qui prend le d\u00e9part pour vous pr\u00e9senter son grand-p\u00e8re, missionnaire au Mozambique et n\u00e9 \u00e0 Ch\u00e9zard-Saint-Martin.<\/p>\n
Bonne lecture \u00e0 vous, et d’avance, merci \u00e0 Olivier.<\/p>\n
Le 30 ao\u00fbt 2019 j\u2019ai \u00e9t\u00e9 invit\u00e9 \u00e0 L\u2019Espace Arlaud, \u00e0 Lausanne pour voir l\u2019exposition \u00ab Derri\u00e8re les Cases de la Mission \u00bb. Cette exposition \u00e9tait organis\u00e9e par le Mus\u00e9e Cantonal d\u2019Arch\u00e9ologie de Lausanne et du Mus\u00e9e d\u2019Ethnographie de Neuch\u00e2tel. J\u2019\u00e9tais convi\u00e9 comme petit fils du missionnaire Henri Alexandre Junod qui a \u00e9t\u00e9 pendant plusieurs ann\u00e9es missionnaire au Mozambique, \u00e0 Rikatla, village qui se trouve \u00e0 25 km au nord de Lourenco Marques (maintenant Maputo).<\/p>\n
Je me permets de vous \u00e9num\u00e9rer quelques dates importantes de la vie de mon grand-p\u00e8re\u00a0:<\/p>\n
Henri Alexandre Junod est n\u00e9 le 17 mai 1863 \u00e0 Ch\u00e9zard-Saint Martin. Son p\u00e8re, Henri Junod, qui \u00e9tait pasteur, a remplac\u00e9 en d\u00e9cembre 1867 le pasteur James Du Pasquier, et c\u2019est ainsi que mon grand-p\u00e8re a v\u00e9cu plusieurs ann\u00e9es dans la maison de Guillaume Farel au pied de la Coll\u00e9giale de Neuch\u00e2tel. Henri Alexandre a \u00e9tudi\u00e9 la th\u00e9ologie \u00e0 la facult\u00e9 de th\u00e9ologie de l\u2019\u00c9glise ind\u00e9pendante de Neuch\u00e2tel. Il compl\u00e9ta ses \u00e9tudes de th\u00e9ologie \u00e0 B\u00e2le et Berlin.\u00a0 A l\u2019\u00e2ge de 22 ans il a \u00e9t\u00e9 consacr\u00e9 pasteur \u00e0 la Coll\u00e9giale. Son premier poste comme pasteur a \u00e9t\u00e9 \u00e0 M\u00f4tiers.<\/p>\n
Le 21 juin 1886 le Conseil de la Mission Romande accepte mon grand-p\u00e8re comme candidat missionnaire. Comme futur missionnaire, il part quelques mois \u00e0 \u00c9dimbourg pour apprendre l\u2019anglais, mais aussi pour acqu\u00e9rir les connaissances m\u00e9dicales et chirurgicales indispensables.<\/p>\n
Apr\u00e8s son mariage avec \u00c9milie Biolley, il part avec son \u00e9pouse en juin 1889 pour Louren\u00e7o Marques. Ils resteront 7 ans au Mozambique o\u00f9 sont n\u00e9es leurs filles, Anne Marie en 1891 et \u00c9lisabeth en 1895. En 1893 na\u00eetra un gar\u00e7on qui d\u00e9c\u00e9dera aussit\u00f4t. En juin 1896 ils repartent pour la Suisse mais en France \u00e0 La Roche-Migennes dans l\u2019Yonne, \u00c9lisabeth meurt d\u2019une violente attaque de dysenterie.<\/p>\n
Ils vivent ensuite \u00e0 Neuch\u00e2tel, \u00e0 la rue Coll\u00e9giale 10, o\u00f9 na\u00eet en 1897 Henri-Philippe. Mon grand-p\u00e8re a une grande p\u00e9riode d\u2019activit\u00e9s litt\u00e9raires\u00a0: en 1896 para\u00eet la \u00ab\u00a0Grammaire Ronga\u00a0\u00bb de 300 pages. Puis en 1897 para\u00eet un charmant volume intitul\u00e9 \u00ab\u00a0les Chants et les Contes des Ba-Ronga\u00a0\u00bb et mon grand-p\u00e8re continue la traduction de la Bible en Ronga. En 1896 paraissait \u00e0 l\u2019imprimerie Paul Attinger \u00ab\u00a0les Ba Ronga, \u00e9tude ethnographique sur les indig\u00e8nes de la baie de Delagoa\u00a0\u00bb.<\/p>\n
Le 8 avril 1899, ils repartent avec leur fils Henri-Philippe pour Louren\u00e7o Marques. Leur fille Anne Marie est rest\u00e9e \u00e0 Paris chez des cousins.<\/p>\n
Lors de sa deuxi\u00e8me campagne au Mozambique mon grand-p\u00e8re a perdu son \u00e9pouse, qui est d\u00e9c\u00e9d\u00e9e le 9 juillet 1901 apr\u00e8s avoir \u00e9t\u00e9 op\u00e9r\u00e9e par le docteur et missionnaire Georges-Louis Liengme (1859-1936). Apr\u00e8s la mort de son \u00e9pouse, Henri Alexandre se s\u00e9pare de son fils Henri-Philippe, qu\u2019il renvoie en Suisse, \u00e0 Couvet chez sa grand-m\u00e8re. En 1902, il revient en Suisse. Le 17 mars 1904, il \u00e9pouse H\u00e9l\u00e8ne Kern-de Schulthess, qui est aussi missionnaire. Ils repartent pour le Mozambique, pour une troisi\u00e8me campagne en Afrique, en juin 1904.<\/p>\n
<\/p>\n
A Rikatla ils fondent une \u00c9cole d\u2019\u00e9vang\u00e9listes.\u00a0 Le 30 avril 1905 nait \u00c9veline mais elle meurt le 12 mai. Le 31 juillet 1908 na\u00eet Blaise \u00c9douard.<\/p>\n
Le 30 juillet 1909 ils reviennent en Suisse. Mon grand-p\u00e8re se met alors \u00e0 r\u00e9diger avec pers\u00e9v\u00e9rance le grand ouvrage de sa vie, en anglais : \u00ab The life of a South African Tribe \u00bb Il y aura 2 volumes de cet ouvrage : 1. Social Life, 2. Mental Life. Il s\u2019agit d\u2019une monographie de la population tsonga. Par la qualit\u00e9 et la quantit\u00e9 des documentations, le livre de mon grand-p\u00e8re repr\u00e9sente une base de travail de premier ordre. Son \u00e9pouse, H\u00e9l\u00e8ne, a consacr\u00e9 des semaines, des mois \u00e0 la correction des \u00e9preuves. \u00a0Elle a second\u00e9 son mari avec grande patience et sa connaissance approfondie de l\u2019anglais lui a \u00e9t\u00e9 une grande aide.<\/p>\n
Fin juin 1913, ils repartent pour Louren\u00e7o Marques en passant par Paris, o\u00f9 ils laissent leur fils Blaise. C\u2019est donc la quatri\u00e8me campagne en Afrique. Le 9 octobre 1914 na\u00eet Etienne-Alexandre, mon p\u00e8re.<\/p>\n
Le 30 mars 1917, H\u00e9l\u00e8ne Junod d\u00e9c\u00e8de. Avant son d\u00e9part d\u00e9finitif pour la Suisse en octobre 1920, mon grand-p\u00e8re a consacr\u00e9 4 nouveaux pasteurs \u00e0 Rikatla. Le 15 octobre il s\u2019installe avec Etienne \u00e0 Auvernier dans la maison de la Mission.<\/p>\n
Mon grand-p\u00e8re quitte Auvernier le 15 juillet 1921 et d\u00e9m\u00e9nage \u00e0 Gen\u00e8ve o\u00f9 il prend le poste d\u2019agent de la Mission. A Gen\u00e8ve il accepte \u00e9galement le poste de Pr\u00e9sident du Bureau International pour la D\u00e9fense des Indig\u00e8nes B.I.D.I. Il profite par ailleurs de publier une seconde \u00e9dition consid\u00e9rablement revue et augment\u00e9e de \u00ab\u00a0The life of a South African Tribe\u00a0\u00bb qui sera plus tard traduite en fran\u00e7ais.<\/p>\n
Mon grand-p\u00e8re d\u00e9c\u00e8de le 22 avril 1934 \u00e0 Gen\u00e8ve et il est enterr\u00e9 \u00e0 Rikatla.<\/p>\n
Voil\u00e0 la vie de mon grand-p\u00e8re. J\u2019aurais bien aim\u00e9 le conna\u00eetre surtout que mon p\u00e8re n\u2019en parlait jamais.<\/p>\n
Pendant la visite de l\u2019exposition \u00ab Derri\u00e8re les cases de la mission \u00bb j\u2019ai appris qu\u2019il existait un papillon qui portait le nom de \u00ab Junodi \u00bb. Mon grand-p\u00e8re \u00e9tait un grand collectionneur de papillons. En plus on pouvait acheter une BD \u00ab Capit\u00e3o \u00bb de Yann Karlen et Stefano Boroni qui est librement inspir\u00e9e des \u00e9crits de Georges-Louis Liengme et de mon grand-p\u00e8re.<\/p>\n
<\/p>\n
En novembre 2019 Rose-Annette Guinchard me t\u00e9l\u00e9phone et me demande si je suis parent avec Henri Alexandre Junod. Je lui r\u00e9ponds oui et je lui ai demand\u00e9 mais pourquoi cette question. Elle m\u2019a alors expliqu\u00e9 que la paroisse de Ch\u00e9zard organise une soir\u00e9e \u00e0 Dombresson sous le titre \u00ab\u00a0rendons \u00e0 Ch\u00e9zard ce qui est \u00e0 Ch\u00e9zard\u00a0\u00bb<\/p>\n
J\u2019ai donc d\u00e9cid\u00e9 d\u2019aller avec Rose-Annette \u00e0 cette soir\u00e9e. La premi\u00e8re partie de la soir\u00e9e, on a parl\u00e9 des pruneaux de Ch\u00e9zard puis, apr\u00e8s une courte pause on a parl\u00e9 du missionnaire Henri Alexandre Junod (Pruneaux et Junod, cela fait une jolie rime) qui est n\u00e9 \u00e0 Ch\u00e9zard et on a montr\u00e9 un film de 2004 o\u00f9 l\u2019on voit mon p\u00e8re, \u00e0 l\u2019\u00e2ge de 90 ans, inaugurer la biblioth\u00e8que \u00ab\u00a0Henri Alexandre Junod\u00a0\u00bb \u00e0 Rikatla, au Mozambique. La t\u00e9l\u00e9vision portugaise avait suivi mon p\u00e8re pendant 3 jours \u00e0 Rikatla et l\u2019avait interrog\u00e9 sur son p\u00e8re. Par ailleurs, dans le film, on voit beaucoup de missionnaires mais aussi des ethnologues parler de mon grand-p\u00e8re. C\u2019\u00e9tait assez \u00e9mouvant de revoir mon p\u00e8re.<\/p>\n
Donc en 2019, j\u2019ai eu le plaisir de m\u2019int\u00e9resser un peu, gr\u00e2ce \u00e0 l\u2019exposition de Lausanne et la soir\u00e9e de la paroisse de Dombresson un peu \u00e0 la Mission suisse-romande au Mozambique. J\u2019ai appris le travail des missionnaires et j\u2019ai toujours pens\u00e9 que la premi\u00e8re t\u00e2che des missionnaires \u00e9tait de convertir les indig\u00e8nes et de leur apprendre notre fa\u00e7on de vivre. Pour moi, un missionnaire \u00e9tait aussi un colonisateur. J\u2019avoue que je n\u2019avais pas une grande estime pour les missionnaires m\u00eame en sachant que mon grand-p\u00e8re \u00e9tait missionnaire. L\u2019exposition a donc chang\u00e9 mon regard sur les missionnaires.<\/p>\n
Les personnages, comme Henri Alexandre Junod ou Georges-Louis Lenigme, font parties des pionniers, des fondateurs d\u2019un mouvement dont DM-\u00e9change et mission est l\u2019h\u00e9ritier. Ils \u00e9taient rattach\u00e9s \u00e0 la Mission suisse en Afrique du Sud, soci\u00e9t\u00e9 missionnaire li\u00e9e aux \u00c9glises libres. Petit \u00e0 petit, des comit\u00e9s de soutien issus des \u00c9glises nationales se cr\u00e9\u00e8rent en faveur de ces soci\u00e9t\u00e9s. En 1963, les \u00c9glises r\u00e9form\u00e9es de Suisse romande fondent DM\u00e9change et mission, h\u00e9riti\u00e8re de ces soci\u00e9t\u00e9s missionnaires.<\/p>\n
L\u2019une des particularit\u00e9s de ce que nos partenaires d\u2019Afrique australe appellent encore la \u00ab mission suisse \u00bb, c\u2019est qu\u2019elle rassemblait toute une s\u00e9rie de corps de m\u00e9tiers, pas uniquement des pasteurs. On estimait que l\u2019\u00c9vangile s\u2019adressait \u00e0 l\u2019\u00eatre humain dans sa globalit\u00e9. Ces premiers missionnaires \u00e9taient donc m\u00e9decins, enseignants, infirmiers, agronomes. Une station missionnaire comprenait une \u00e9cole, un h\u00f4pital, parfois une \u00e9cole d\u2019agriculture ou un internat. Tous ces missionnaires s\u2019int\u00e9ressaient \u00e0 la langue locale, aux coutumes, un bon nombre ont fait \u0153uvre d\u2019anthropologue et ont collabor\u00e9 avec les soci\u00e9t\u00e9s scientifiques de l\u2019\u00e9poque. Les missions protestantes ont attach\u00e9 une importance particuli\u00e8re \u00e0 l\u2019\u00e9ducation, vue comme lib\u00e9ratrice, et d\u00e9velopp\u00e9 des r\u00e9seaux d\u2019\u00e9coles. Nombre de membres des \u00e9lites politiques menant un pays vers l\u2019ind\u00e9pendance sont issus des missions. Ici, on peut nommer Eduardo Mondlane qui a commenc\u00e9 sa primaire \u00e0 l\u2019\u00e9cole de la Mission Suisse et la terminera \u00e0 Louren\u00e7o Marques. Il obtiendra son dipl\u00f4me d\u2019\u00e9vang\u00e9liste \u00e0 Rikatla. Eduardo Mondlane est consid\u00e9r\u00e9 comme le p\u00e8re du Mozambique ind\u00e9pendant et premier pr\u00e9sident du Front de lib\u00e9ration du Mozambique (FRELIMO). Il sera tu\u00e9 par un colis pi\u00e9g\u00e9 le 3 f\u00e9vrier 1969. Le Mozambique est devenu ind\u00e9pendant du Portugal le 25 juin 1975.<\/p>\n
Pour terminer je voudrais vous montrer une lettre \u00e9crite par des \u00e9tudiants du Mozambique \u00e0 des futurs missionnaires lors de cours de langue \u00e0 Lisbonne. Propos rapport\u00e9s par Janet Mondlane, \u00e9pouse d\u2019Eduardo Mondlane, dans une lettre \u00e0 Alain Reymond, secr\u00e9taire g\u00e9n\u00e9ral de la Mission, le 8 novembre 1960.<\/p>\n
A m\u00e9diter.<\/p>\n
<\/p>\n
Peseux, le 3 avril \u00a02020<\/p>\n
Olivier Junod
\nConseiller de paroisse de La BARC<\/p>\n
<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"
La parole est donn\u00e9e \u00e0 nos paroissiens qui ont le souhait de partager avec vous ce qui leur tient \u00e0 c\u0153ur. Et c’est Olivier Junod qui prend le d\u00e9part pour vous pr\u00e9senter son grand-p\u00e8re, missionnaire au Mozambique et n\u00e9 \u00e0 Ch\u00e9zard-Saint-Martin. Bonne lecture \u00e0 vous, et d’avance, merci \u00e0 Olivier. L\u2019entreprise missionnaire Suisse romande en … Continuer la lecture de « Henri Alexandre Junod racont\u00e9 par son petit-fils »<\/span><\/a><\/p>\n","protected":false},"author":19,"featured_media":1158,"comment_status":"closed","ping_status":"closed","sticky":false,"template":"","format":"standard","meta":{"footnotes":""},"categories":[1],"tags":[],"class_list":["post-1149","post","type-post","status-publish","format-standard","has-post-thumbnail","hentry","category-non-classe"],"yoast_head":"\n