Lefigaro.fr<\/a> en date du 25 mai 2015. Voici ce qu’il \u00e9crit au sujet de la Pentec\u00f4te:<\/h6>\nQui se rappelle ce que signifie la pentec\u00f4te? Contrairement \u00e0 l’Ascension, le terme n’est pas explicite. On finit donc par l’oublier, puis par l’ignorer. C’est peut-\u00eatre la raison pour laquelle ce jour f\u00e9ri\u00e9 a \u00e9t\u00e9 le premier \u00e0 \u00eatre sacrifi\u00e9 sur l’autel de l’\u00e9conomie. En France, la charge sociale est trop lourde, il faut donc, pour continuer de financer ce secteur d’entraide en perp\u00e9tuelle augmentation, rogner sur certains acquis, et, ce jour, f\u00e9ri\u00e9 mais non obligatoirement ch\u00f4m\u00e9, fait partie des candidats. No\u00ebl, \u00e0 la signification \u00e9vidente et au poids culturel imposant, ne saurait jouer un tel r\u00f4le. La pentec\u00f4te si. Et pourtant, cette journ\u00e9e, qui cl\u00f4t en quelque sorte la s\u00e9quence initi\u00e9e par le Vendredi Saint, rev\u00eat une importance capitale, et riche d’enseignements y compris pour un pays la\u00efcis\u00e9 comme le n\u00f4tre.<\/p>\n
Petit rappel des faits: J\u00e9sus est arr\u00eat\u00e9 et crucifi\u00e9 une veille de Sabbat, un vendredi donc, que nous comm\u00e9morons d\u00e9sormais en qualifiant ce premier vendredi qui suit la nouvelle lune de printemps de \u00absaint\u00bb. Il ressuscite au matin du troisi\u00e8me jour (le premier \u00e9tant celui de la mise en croix), soit, comme le pr\u00e9cise l’\u00e9vangile, \u00abau matin du premier jour de la semaine\u00bb, un dimanche matin, le dimanche de P\u00e2ques. Les quarante jours qui suivent cet \u00e9v\u00e8nement si particulier pour les chr\u00e9tiens, durant lesquels les disciples profiteront comme jamais auparavant de l’enseignement du Christ, nous conduisent au jour de l’\u00e9l\u00e9vation de J\u00e9sus-Christ au-dessus de toutes conditions mat\u00e9rielles, un jeudi que nous nommons \u00abde l’ascension\u00bb. L’\u00e9vangile de Marc pr\u00e9cise que la s\u00e9paration physique n’entraina cependant pas une s\u00e9paration compl\u00e8te du Christ avec ses disciples, c’est \u00e0 dire du spirituel et du temporel, car, alors que les disciples \u00abs’en all\u00e8rent pr\u00eacher partout\u00bb, \u00able Seigneur travaillait avec eux\u00bb. Cette proximit\u00e9 spirituelle conserv\u00e9e se manifestera dix jours plus tard par cet \u00e9v\u00e8nement si singulier relat\u00e9 dans le second chapitre des Actes des ap\u00f4tres.<\/p>\n
Si le chr\u00e9tien voit dans ce miracle suppl\u00e9mentaire la manifestation de l’universalit\u00e9 du message \u00e9vang\u00e9lique, la question se pose pour le citoyen dont la foi est peut-\u00eatre diff\u00e9rente, voire inexistante\u00a0: Que faire de ce symbole, et donc du jour f\u00e9ri\u00e9 qui y est associ\u00e9\u00a0?<\/p>\n
Le jour de la pentec\u00f4te, du grec \u00abh\u00eam\u00e9ran t\u00eas pent\u00e8kost\u00eas\u00bb signifiant le cinquanti\u00e8me jour, est un \u00e9cho aux cinquante jours qui s\u00e9parent, dans le calendrier juda\u00efque, la f\u00eate de Pessa’h (P\u00e2que juive) de Shavouot (la f\u00eate de la moisson) ; mais au sein du calendrier chr\u00e9tien, ce jour prend une signification particuli\u00e8re: La promesse du Christ faite aux ap\u00f4tres: \u00abEt moi, je prierai le P\u00e8re, et il vous donnera un autre consolateur, afin qu’il demeure \u00e9ternellement avec vous, l’Esprit de v\u00e9rit\u00e9, que le monde ne peut recevoir, parce qu’il ne le voit point et ne le conna\u00eet point ; mais vous, vous le connaissez, car il demeure avec vous, et il sera en vous.\u00bb (Jean 14: 16,17) J\u00e9sus annonce ainsi la venue du Consolateur, ou Paraclet, de l’Esprit saint. L’intercession, \u00e0 partir de ce jour-l\u00e0, n’est plus mat\u00e9rielle, mais spirituelle. Le jour de la Pentec\u00f4te, les disciples, r\u00e9unis \u00e0 J\u00e9rusalem, re\u00e7oivent cet esprit saint, et les hommes pr\u00e9sents \u00abde toutes les nations\u00bb, en furent t\u00e9moins et \u00abchacun les entendait parler dans sa propre langue\u00bb.<\/p>\n
En un si\u00e8cle qui est peut-\u00eatre le plus mat\u00e9rialiste que l’humanit\u00e9 ait connu, l’oubli du jour de la Pentec\u00f4te est probablement un \u00e9cho \u00e0 l’oubli de l’Esprit, ou pire, au d\u00e9ni de l’Esprit.<\/p>\n
L’Esprit saint est assez souvent le parent pauvre de la Trinit\u00e9, car le P\u00e8re et le Fils occupent une place centrale dans l’imaginaire collectif. Cela est probablement la r\u00e9sultante de la mat\u00e9rialisation du P\u00e8re dans le fils, et de la propension de l’entendement humain \u00e0 ne se saisir que de ce qu’il peut voir, toucher et sentir. Et pourtant, de quoi sinon des r\u00e9alisations de l’esprit, l’humanit\u00e9 peut-elle \u00eatre la plus fi\u00e8re? De facto, toute r\u00e9alisation concr\u00e8te, qu’il s’agisse des droits de l’homme ou de la construction de la tour Eiffel, est d’abord une r\u00e9alisation de l’esprit, un concept, une notion. La la\u00efcit\u00e9, cette approche du politique permettant la coexistence pacifique de tous ind\u00e9pendamment des croyances de chacun est aussi une r\u00e9alisation de l’esprit, qui trouve d’ailleurs un soutien dans les \u00e9vangiles.<\/p>\n
L’universalit\u00e9 de cette pens\u00e9e renouvel\u00e9e qui est celle des ap\u00f4tres au jour de la Pentec\u00f4te et qui f\u00e9condera l’histoire de la pens\u00e9e occidentale ne peut manquer de r\u00e9sonner aujourd’hui. Car avant que le choc des civilisations puisse \u00eatre mat\u00e9rialis\u00e9 sous forme de dissensions, exactions, actes terroristes et guerres, il faut qu’il existe en pens\u00e9e ; il faut qu’il y ait, dans les conceptions intellectuelles des individus, un d\u00e9ficit de spiritualit\u00e9 si fort qu’il les pousse \u00e0 s’accrocher \u00e0 leurs vues \u00e9troites de l’homme et du politique de fa\u00e7on si rigide que ces conceptions en deviennent cassantes et blessantes. L’oubli de la signification du jour de la Pentec\u00f4te est un \u00e9cho \u00e0 l’oubli de l’universalit\u00e9 de la fraternit\u00e9, pourtant incluse dans notre devise r\u00e9publicaine, laquelle a pour objet de ponctuer l’exigence de libert\u00e9 et d’\u00e9galit\u00e9, et de rappeler que sans fraternit\u00e9, les deux premiers termes perdent de leur sens, de leur vitalit\u00e9, et risquent de finir comme le figuier des \u00e9vangiles, sec, car incapables de porter du fruit. En un si\u00e8cle qui est peut-\u00eatre le plus mat\u00e9rialiste que l’humanit\u00e9 ait connu, l’oubli du jour de la pentec\u00f4te est probablement un \u00e9cho \u00e0 l’oubli de l’Esprit, ou pire, au d\u00e9ni de l’Esprit. Nous avons aujourd’hui plus que jamais besoin de repenser la signification de l’Esprit, et peut-\u00eatre m\u00eame, et peut-\u00eatre surtout, celle de l’Esprit saint.<\/p>\n