Culte de fête du catéchisme avec baptême et confirmations
Textes bibliques : Jean 15, 8-17
Message à 2 voix : Risquer Dieu
De Véronique Tschanz Anderegg et Patrick Schlüter
Véronique :
J’aimerais vous raconter l’histoire de Naoto Matsumura. C’est un agriculteur japonais. Après la catastrophe nucléaire de Fukushima en 2011, il a décidé de rester dans la zone interdite par les autorités. Les consignes étaient claires : il fallait se calfeutrer et éviter tout contact. Effaré qu’on lui demande d’abandonner son chien et tout son bétail, rejeté par le reste de sa famille, Naoto Matsumura resta seul devant un paysage désolé. En remarquant que chats, chiens, cochons, vaches et autruches avaient été laissés à leur triste sort et sans nourriture, Naoto retrouva une nouvelle énergie. Pas question de laisser les services vétérinaires euthanasier en masse. Jour après jour, il a risqué sa vie pour nourrir, soigner tout ce monde.
Cette histoire vraie me rappelle le mot d’ordre de Jésus que nous venons d’entendre : « le plus grand amour que quelqu’un puisse montrer, c’est de donner sa vie pour ses amis »
Patrick :
Oui, elle est impressionnante cette histoire de Naoto Matsumura. Quels risques il a pris et continue sans doute de prendre au nom de ses convictions et de son amour des animaux ! Je ne pense pas que j’aurais été prêt à faire cela pour des animaux, mais je comprends qu’on soit prêt à risquer sa vie pour quelque chose ou quelqu’un auquel ont tient ! Ça me fait penser à une parole de Martin Luther King qui a lutté de manière non-violente pour les droits civiques des noirs aux Etats-Unis. 5 mois avant d’être assassiné, il a dit :
« Si vous n’avez jamais rencontré rien qui vous soit si cher, si précieux que vous soyez prêt à mourir pour ça, alors vous n’êtes pas apte à vivre. »[1]
Cette question m’interpelle : pour quoi est-ce que je suis prêt à risquer ma vie ? Jusqu’au est-ce que je suis prêt à aller au nom de ma foi en Jésus-Christ ?
Véronique :
Au camp de KT, nous avons pu découvrir qu’à l’Antiquité et au Moyen-Âge, des humains étaient prêts à mourir pour Dieu et pour défendre l’Église. Cela reste vrai dans certaines parties du monde encore aujourd’hui. Mais il existe d’autres causes pour lesquelles certainEs acceptent de donner leur vie : la recherche médicale, la lutte pour la paix, le combat contre le racisme et la discrimination, l’engagement pour la survie des espèces. Est-ce que ces causes sont moins nobles quand elles ne sont pas faites au nom de Dieu ? Je ne me prononcerai pas. Mais ces changements de visée nous amènent à un constat : l’Église et la foi chrétienne ne constituent plus le ciment de notre société. Cela ne signifie pas que l’Église n’a plus de sens. Elle pourrait adopter l’humble fonction de devenir levain pour notre société et on passerait du ciment au levain !
Patrick :
J’aime bien cette idée du levain. C’est chose de vivant qui peut grandir. Quand Jésus nous dit qu’il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis, c’est d’abord de lui qu’il parle. Il nous a aimé jusqu’à l’extrême. Il est mort par amour pour nous. Pour moi, ça signifie que je ne suis pas seul dans tout ce je vis. Dieu a déjà fait le chemin pour me rejoindre là où je suis. Cet amour de Dieu, cette amitié de Jésus pour moi me touche. Cela libère de la pression de réussir parce je me sens aimé et précieux quoi que je fasse. Cela me permet aussi d’aimer. Tout cela, c’est important et précieux pour moi.
Véronique :
Oui, c’est aussi très important pour moi et ça nous enlève une sacrée pression : Dieu ne nous demande pas de nous sacrifier, il ne nous oblige pas à établir des exploits. Mais comme à des amis, Dieu nous invite à « risquer Dieu ». C’est-à-dire à expérimenter de nouvelles façons de comprendre la vie, à ne pas se scléroser dans des idées toutes faites, à éviter le ronron des habitudes, à s’enthousiasmer pour ce qui nous entoure, à partir à la rencontre de personnes atypiques. Risquer Dieu, c’est comme tenter une merveilleuse aventure.
Dans cette farandole de la vie, Dieu nous sollicite, chacunE à notre façon, avec les dons qui nous sont propres, à participer au mouvement d’amour qu’il a initié au travers du Christ.
Patrick :
La vraie amitié transforme parce qu’un ami m’invite à donner le meilleur de moi-même. Jésus est notre ami, mais ce n’est pas un pote. Il ose me dire ce qui n’est pas forcément agréable à entendre pour me permettre d’avancer. L’amour de Dieu, l’amitié avec Jésus nous invitent à donner le meilleur de nous-mêmes. Dieu reste Dieu et il n’est pas à notre service. La rencontre avec lui peut transformer la vie comme des rencontres avec de vrais amis et des personnes qui nous marquent peuvent le faire aussi. La vie avec Dieu, l’amitié avec Jésus, ce n’est pas un long fleuve tranquille, mais c’est une rencontre qui transforme. Cet amour de Dieu pour moi peut donner sens à ma vie quelles que soient les circonstances.
Gardons précieusement cette parole de Jésus : « Je vous aime comme le Père m’aime. Demeurez dans mon amour. »
Amen
[1] Sermon prononcé à Ebezener le 5 novembre 1967