T\u00e9l\u00e9charger ici le fichier pdf du texte de la pr\u00e9dication<\/a><\/p>\n Esa\u00efe 7,10-16<\/a> Un journal interrogeait des jeunes p\u00e8res sur ce qui avait fait surgir en eux le sentiment de paternit\u00e9\u00a0:<\/p>\n l\u2019un disait que c\u2019est la premi\u00e8re fois que son premier-n\u00e9 lui a serr\u00e9 le doigt de toutes ses forces, et qu\u2019il a senti cette attente de l\u2019enfant… Un autre parlait de l\u2019\u00e9motion de la naissance ; un troisi\u00e8me \u00e9voquait ces moments o\u00f9 son b\u00e9b\u00e9 s\u2019\u00e9tait endormi contre lui, compl\u00e8tement abandonn\u00e9 – un p\u00e8re adoptif racontait la m\u00eame chose.<\/p>\n Vous me direz\u00a0: pourquoi nous poser cette question de la paternit\u00e9\u00a0? La vedette des r\u00e9cits de No\u00ebl est Marie, la m\u00e8re, non\u00a0?<\/p>\n Je persiste, car ce r\u00e9cit de la naissance de J\u00e9sus centr\u00e9 sur Joseph nous dit quelque chose sur le sens de la paternit\u00e9 \u2013 sur les familles et peut-\u00eatre en filigrane quelque chose sur Dieu notre P\u00e8re… et puis je crois que cela nous dit quelque chose de notre place de croyants, appel\u00e9s \u00e0 \u00eatre parents de vies humaines qui nous sont confi\u00e9es.<\/b><\/p>\n A plusieurs reprises, lorsque l\u2019on pr\u00e9parait la f\u00eate de No\u00ebl, personne ne voulait jouer Joseph, alors que plusieurs petites filles r\u00eavaient d\u2019\u00eatre Marie\u00a0! Pas \u00e9tonnant, Joseph est l\u00e0 juste comme figurant… \u2013 en lisant les \u00e9vangiles, on s\u2019aper\u00e7oit d\u2019un parall\u00e9lisme magnifique\u00a0: l\u2019\u00e9vangile selon Luc donne la place \u00e0 Marie (avec l\u2019annonciation et la visitation, le magnificat) \u2013 et mentionne Joseph \u00e0 ses c\u00f4t\u00e9s \u2013 tandis que l\u2019\u00e9vangile selon Matthieu donne la place \u00e0 Joseph (c\u2019est \u00e0 lui que la naissance est annonc\u00e9e, c\u2019est \u00e0 lui que l\u2019ange dit\u00a0: \u00ab\u00a0ne crains pas \u00bb, et c\u2019est lui, l\u2019homme juste, qui par son \u00e9coute et sa disponibilit\u00e9, sa mise en route, permet \u00e0 l\u2019histoire de se r\u00e9aliser) et se contente de nommer Marie\u00a0; pour Matthieu, Joseph est absolument indispensable \u00e0 l\u2019origine de J\u00e9sus \u2013 m\u00eame si J\u00e9sus n\u2019est pas \u00ab\u00a0de lui\u00a0\u00bb\u00a0<\/b>?\u00a0…<\/p>\n J\u00e9sus, \u00e0 son origine, (sa gen\u00e8se), porte en lui l\u2019humain et le divin \u2013 et c\u2019est pour exprimer cette conviction que l\u2019histoire raconte que J\u00e9sus est fils de Marie et n\u00e9 de l\u2019Esprit, avec un p\u00e8re humain, n\u00e9cessaire \u00e0 son insertion dans la vie, mais absent de son origine…<\/p>\n \u00ab J\u00e9sus<\/b> (n\u00e9 d\u2019une femme et de l\u2019Esprit) est par nature ce que nous sommes appel\u00e9s \u00e0 devenir par gr\u00e2ce \u00bb<\/b> disait un P\u00e8re de l\u2019Eglise. J\u00e9sus est l\u2019\u00eatre humain pleinement accompli qui vit de Dieu-la-Source, et nous, nous sommes appel\u00e9s \u00e0 devenir \u00e0 notre tour enfants de Dieu <\/i>\u2013 et d\u2019ailleurs nous le sommes<\/i> (cf 1Jn3). Avec une telle lecture, qui insiste sur la ressemblance entre J\u00e9sus et nous, la naissance de J\u00e9sus nous parle non seulement de son origine mais aussi du sens de la vie humaine, et de la paternit\u00e9 humaine, de la vie du croyant.<\/p>\n Donc : Joseph est un homme juste<\/b>, qui respecte la Torah, qui a le souci que chacun trouve sa juste place; Joseph-le-juste ne veut pas humilier sa femme. On ne comprend pas tout \u00e0 fait comment, concr\u00e8tement, le fait de la r\u00e9pudier secr\u00e8tement Marie (avec une lettre et deux t\u00e9moins) r\u00e9soudrait le probl\u00e8me, les fian\u00e7ailles \u00e9tant en g\u00e9n\u00e9ral connues de tous, et la punition de l\u2019adult\u00e8re pouvant \u00eatre la lapidation. Mais le r\u00e9cit souligne clairement le souci de Joseph de bien agir. Mais il est d\u00e9chir\u00e9 par cette situation\u00a0: \u00ab\u00a0il avait form\u00e9 ce projet\u00a0\u00bb peut aussi \u00eatre traduit\u00a0: \u00ab\u00a0il tournait et retournait les choses dans sa t\u00eate\u00a0\u00bb.<\/p>\n Et dans un songe, l\u2019ange de Dieu lui parle (qui avait parl\u00e9 \u00e0 Hagar au bord du puits (cf Gen16,7)\u00a0: \u00ab\u00a0<\/b>ne crains pas\u00a0<\/b>!\u00a0\u00bb<\/b> Ne crains pas, c\u2019est la parole qui rythme les histoires bibliques, quand l\u2019angoisse ou le d\u00e9sespoir \u00e9treint le croyant. Joseph peut trouver un apaisement \u00e0 son tourment, car une issue in\u00e9dite se dessine devant lui.<\/b> Ce qui arrive \u00e0 Marie le d\u00e9passe et le bouscule \u2013 et en fait, tout enfant bouscule la vie, et m\u00eame lorsqu\u2019il a \u00e9t\u00e9 r\u00eav\u00e9, attendu, m\u00eame lorsque l\u2019on s\u2019est pr\u00e9par\u00e9 soigneusement \u00e0 sa venue… n\u2019est-ce pas ?<\/b><\/p>\n Le voil\u00e0 donc, notre Joseph, appel\u00e9 \u00e0 accueillir l\u2019inattendu, \u00e0 s\u2019adapter \u00e0 ce qui advient<\/b> \u2013 et au c\u0153ur de cette passivit\u00e9, il est appel\u00e9 \u00e0 agir<\/b> de deux mani\u00e8res\u00a0: en prenant Marie pour femme et donnant un nom \u00e0 l\u2019enfant (ce sont les deux seuls mots actifs qui le concernent).<\/p>\n Joseph le juste d\u00e9couvre une nouvelle mani\u00e8re d\u2019\u00eatre juste <\/b>:<\/b> non plus en faisant primer la loi sur l\u2019\u00eatre humain, mais <\/b>en mettant au centre l\u2019\u00eatre humain fragilis\u00e9\u00a0: ici, sa femme et l\u2019enfant \u00e0 na\u00eetre<\/b>. Il est juste \u00e0 la mani\u00e8re dont le sera J\u00e9sus\u00a0: en pla\u00e7ant la vie de l\u2019\u00eatre humain au centre, et la loi \u00e0 son service.<\/p>\n Et puis Joseph devient le p\u00e8re \u2013 le p\u00e8re adoptif <\/b>\u2013<\/b> et il agit en vrai p\u00e8re<\/b> (c\u2019est tr\u00e8s int\u00e9ressant que nombre de psychanalystes disent que, dans le travail psychologique, tout p\u00e8re est adoptif ; en effet, la m\u00e8re ressent son enfant comme une part d\u2019elle-m\u00eame, son travail psychologique \u00e0 elle sera d\u2019apprendre \u00e0 aimer son enfant en le distinguant d\u2019elle, en se d\u00e9tachant avec amour du fruit de ses entrailles \u2013 alors que le travail du p\u00e8re est de s\u2019attacher \u00e0 cet enfant qui lui est donn\u00e9 par la femme qu\u2019il aime. [Je me demande si, avec les \u00e9chographies, l\u2019haptonomie, le sentiment de paternit\u00e9 ne prend pas d\u2019autres formes et d\u2019autres chemins…].)<\/p>\n Joseph \u2013 p\u00e8re adoptif, vrai p\u00e8re \u2013 re\u00e7oit cet enfant en r\u00eave<\/b>. C\u2019est-\u00e0-dire qu\u2019il l\u2019accepte jusque dans son inconscient. Jusqu\u2019au fond de lui-m\u00eame\u00a0<\/b>; et jusque dans la r\u00e9alit\u00e9<\/b>, puisqu\u2019il inscrit l\u2019enfant dans sa propre lign\u00e9e. C\u2019est par Joseph que J\u00e9sus devient \u00ab fils de David \u00bb (ce titre le d\u00e9signera comme le Messie attendu).<\/p>\n Comme p\u00e8re, Joseph donne un nom \u00e0 l\u2019enfant, et donner un nom, c\u2019est donner une identit\u00e9<\/b>. Et choisir un nom, c\u2019est r\u00eaver un avenir<\/b> pour l\u2019enfant, insuffler un caract\u00e8re, esquisser un \u00ab\u00a0programme de vie\u00a0\u00bb – on donne \u00e0 un enfant le nom de quelqu\u2019un \u00e0 qui on aimerait qu\u2019il ressemble, le nom qui sonne bien \u00e0 nos oreilles. Ce choix n\u2019est jamais innocent\u00a0; il permet aux parents d\u2019accueillir pleinement le nouveau-n\u00e9 dans leur vie. C\u2019est magnifique, mais il y a toujours le risque que ce choix soit empreint de possessivit\u00e9, troubl\u00e9 du d\u00e9sir de donner un moule \u00e0 l\u2019existence de son enfant, de programmer ce qu\u2019il sera, de vouloir le ma\u00eetriser. Mais la vie se charge de nous apprendre \u2013 parfois durement et douloureusement \u2013 que nous ne poss\u00e9dons pas nos enfants…<\/p>\n Ce r\u00e9cit nous ouvre \u00e0 un sens profond\u00e9ment beau et lib\u00e9rateur\u00a0: d\u2019embl\u00e9e est affirm\u00e9e la vocation de l\u2019enfant \u00e0 na\u00eetre\u00a0: il ne sera pas juste l\u2019enfant de ses parents, il aura sa propre voie \u00e0 suivre \u2013 ouverte par Dieu<\/b>.<\/p>\n Sa voie \u00e0 suivre… Comme tout enfant, m\u00eame ceux qui n\u2019auront jamais de destin c\u00e9l\u00e8bre.<\/p>\n Le nom que Joseph donne \u2013 Joshua, J\u00e9sus, Josu\u00e9, c\u2019est \u00e0 dire Dieu sauve<\/i>, nom tout \u00e0 fait commun en h\u00e9breu, mais qui annonce le programme de vie du Christ… \u2013 ce nom lui a \u00e9t\u00e9 souffl\u00e9 par Dieu, et cela \u00e9vite \u00e0 Joseph toute vell\u00e9it\u00e9 de possessivit\u00e9 envers cet enfant. Cette mise \u00e0 distance, ce tiers qu\u2019est Dieu dans l\u2019histoire de la naissance de J\u00e9sus, permet \u00e0 Joseph de se montrer un vrai p\u00e8re, qui prend soin de la m\u00e8re et prot\u00e8ge l\u2019enfant. Et puis qui s\u2019effacera…<\/b> laissant J\u00e9sus advenir comme adulte, comme homme n\u00e9 de l\u2019Esprit\u00a0! (Dieu, apr\u00e8s la cr\u00e9ation du monde, ne s\u2019est-il pas retir\u00e9 pour laisser l\u2019homme advenir, et na\u00eetre \u00e0 sa vie adulte\u00a0?) On ne parlera plus de Joseph, mais il aura \u00e9t\u00e9 ce p\u00e8re qui a permis l\u2019histoire du Fils. Un vrai p\u00e8re !<\/p>\n Chez les peintres, Joseph a souvent une attitude protectrice et aimante, tourn\u00e9e vers l\u2019enfant. Sur une image anonyme du Moyen Age, on le voit faisant la lessive au moment de la naissance\u00a0; sur le tableau ci-contre*, l\u2019enfant-J\u00e9sus regarde son p\u00e8re et lui tire la barbe… quelle complicit\u00e9 se lit dans cet \u00e9change de regards, quelle tendresse entre ce p\u00e8re adoptif, vrai p\u00e8re, efficace et aimant, et l\u2019enfant.<\/p>\n Selon notre r\u00e9cit si riche, la paternit\u00e9, c\u2019est donc<\/p>\n accepter d\u2019\u00eatre bouscul\u00e9, et garder confiance\u00a0;<\/p>\n saisir l\u2019importance de na\u00eetre de ses parents mais aussi de l\u2019Esprit\u00a0;<\/p>\n \u00eatre capable de s\u2019investir pour prot\u00e9ger et prendre soin de la vie sans possessivit\u00e9.<\/p>\n Et puis savoir s\u2019effacer.<\/p>\n Non, les enfants ne nous appartiennent pas, m\u00eame pas lorsqu\u2019ils sont n\u00e9s de nous.<\/p>\n Ils sont appel\u00e9s, comme nous tous, \u00e0 \u00eatre enfants de Dieu, n\u00e9s de l\u2019Esprit. Nous, nous pouvons, \u00e0 la suite de Joseph, devenir parents adoptifs\u00a0: nous laisser bousculer par la vie inattendue, avancer sans crainte \u2013 et prot\u00e9ger les plus petits d\u2019entre nous pour les aider \u00e0 advenir et \u00e0 grandir \u2013 sans jamais les poss\u00e9der. C\u2019est l\u00e0 notre r\u00f4le de croyant.<\/p>\n AMEN<\/p>\nLectures bibliques<\/strong><\/em><\/h2>\n
\nMatthieu 1,18-25<\/a><\/p>\nQu\u2019est-ce qui donne \u00e0 un p\u00e8re le sentiment d\u2019\u00eatre p\u00e8re ?<\/h2>\n
Que nous dit le personnage de Joseph ?<\/h2>\n
\n
D\u00e9chir\u00e9, Joseph\u00a0? D\u00e9chir\u00e9, comme nous, lorsque nous ne voyons aucune issue heureuse et paisible \u00e0 un probl\u00e8me et que nous choisissons la solution la moins pire…<\/h2>\n
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<\/a><\/p>\n