Voyage d’entraide, de partage et de solidarité de l’AJ au Mexique 2025

L’arrivée au Mexique

Le 18 juillet dernier, nous prenions l’avion le cœur ouvert à la rencontre et l’esprit curieux pour atterrir une quinzaine d’heures plus tard à Mexico city. Après une journée de découverte de l’histoire et des cultures mexicaine par une visite du centre-ville et du musée d’Anthropologie, nous avons voyagé deux heures pour enfin arriver à Apaxco en début de soirée. Depuis un an, nous avions entendu parler de cette petite ville dans l’état de Mexico par lequel passe le train de marchandise « La Bestia » (la Bête, ou le Monstre) et où Holcim possède une usine de ciment qui fait la taille de la petite ville. Au réveil, nous avons découvert un paysage soupoudré de poussière de ciment qui affecte la santé de la nature comme celles des êtres humains. C’est là que nous avons passé deux semaines dans les 4 murs de l’église méthodiste et du centre d’accueil pour les migrants qui ont entamé le long périple des pays d’Amérique centrale pour rejoindre les USA.

Servir

Nous avions beaucoup discuté des possibilités d’être au service de la communauté d’Apaxco et des migrants de passage et 3 axes avaient été esquissé. La politique migratoire des USA a modifié complètement la possibilité d’y entrer, c’est encore plus risqué. Si le centre pouvait accueillir jusqu’à 1000 personnes par semaine en fin d’année 2024, cet été il a été un refuge pour environ une cinquantaine de personnes durant notre séjour dont la plupart bénéficie de la possibilité de prendre une douche, un repas ou demande des habits. Rare sont ceux et celles qui s’arrêtent pour dormir, le désir d’avancer dans le périple les pousse à poursuivre le chemin. Les contrôles sont devenus plus fréquents sur le train « la Bestia », les migrants préfèrent marcher, jusqu’à 12- 14 heures par jour.

Faire de l’espace et trier

Le centre d’accueil a accumulé de nombreux sacs d’habits remplissant des pièces entières qui ne peuvent pas être utilisées pour des activités ou comme dortoirs. Patiemment et durant deux semaines, des jeunes de l’AJ ont trié, rangé dans des cartons, jeté, nettoyé pour organiser les stocks d’habits et surtout créer de l’espace, offrir un peu d’air dans le centre.

Arracher et planter

Une bande de terre laissée à l’abandon a été, au fil des jours, transformée en un jardin potager. Arracher l’herbe, enlever les cailloux, ramasser tous les déchets et constater que la terre est tellement polluée qu’il ne sera pas possible de planter des légumes, c’est trop risqué pour la santé. Des jeunes de l’équipe ont alors imaginé un jardin surélevé dans des bacs et des tuyaux fixés au mur : camomille, arnica, tomates, courgettes ont été plantés. Les enfants de la communauté ont participé à l’élaboration du jardin dont ils prendront soin à notre départ avec l’espérance que ce petit coin soit une oasis où l’on prend soin de la vie malgré la pollution si présente à Apaxco.  

Imaginer et peindre

Un artiste de la communauté a imaginé une grande fresque sur le thème de la migration qui raconte les histoires de 3 personnes qui sont passés dans le centre.  Chacun-e du groupe a aidé à peindre cette fresque, tous y ont mis leur touche de couleur. « N’oubliez pas l’hospitalité, car sans le savoir,  certains ont accueilli des anges », c’est avec cette invitation que nous sommes partis au Mexique. Un jeune du groupe a imaginé la suite de la fresque en intégrant des symboles qui disent un bout de la rencontre interculturelle de cet été comme une trace de notre passage. Cette fresque peinte en deux semaines a suscité de l’étonnement et de la reconnaissance tant pour les habitants d’Apaxco qui s’arrêtaient pour discuter sur la fresque, la migration et la raison de notre présence dans leur ville, que pour les personnes migrantes : « c’est notre histoire que vous avez peinte ! ».

Une histoire de scorpions et l’Ahorita

Un voyage d’entraide, de solidarité et de partage, c’est aussi différentes manières de voir, de comprendre le monde et d’y vivre. Quelle ne fût pas notre surprise de découvrir des scorpions qui ont éveillés la peur en nous, mais quoi de plus normal pour les jeunes mexicains qui ont écouté notre surprise et nos questions avec un petit sourire au coin. « C’est vrai, il n’y a pas de scorpions en Suisse et nous avons besoin de vous pour savoir comment réagir. Alors racontez-nous quoi faire ! » Alors nous avons été attentifs, secoué nos chaussures avant de les mettre et renversé les sacs d’habits par terre pour trier au lieu de plonger nos mains dedans.

Il y a eu de la frustration aussi parce que nous n’habitons pas le monde de la même manière. Une grande partie du matériel nécessaire pour pouvoir servir la communauté et le centre manquait. Nous avons dû demander de nombreuses fois pour avoir des cartons, du terreau, de la peinture. Nous avons fréquemment entendu « Ahorita » qui peut signifier « tout de suite », « bientôt », « dans quelques jours », ou même « jamais » et qui a mis notre patience et l’impatience de pouvoir poursuivre notre service à rude épreuve. Le temps est vécu différemment, peut-être avons laissé une pincée d’organisation à Apaxco et emporté avec nous une dose d’Ahorita parce que certaines choses peuvent attendre et que prendre le temps de souffler en dégustant un café fait du bien au cœur et au corps.

La gratitude  

La vie communautaire et le prendre soin des uns des autres est une expérience forte de ces deux semaines au Mexique tant dans le groupe que dans les contacts avec les personnes migrantes et la communauté méthodiste d’Apaxco. Partager du temps, des rires, nos histoires de vie et chanter ensemble a été précieux et a façonné notre communauté vécue durant notre séjour. Ainsi découvrir que la vie est fragile et que même dans les difficultés, il peut y avoir de l’espace pour rire,  chanter, partager et nourrir ainsi notre espérance.

Nous avons été très touchés par les si nombreux cadeaux que nous avons reçus lorsqu’est venu le temps de dire au revoir aux personnes. Et nous avons accueilli ces gestes de gratitude comme signe de ce qui a peut-être été partagé durant ce séjour, les traces visibles de notre passage comme les matelas, une machine à laver, des panneaux solaires pour l’électricité, la fresque, le potager, les rangements et les traces invisibles peut-être pour nous dans les relations tissées, les instants partagés. Ce qui est certain, c’est que nous avons rencontré des anges qui ont pris soin de nous au quotidien en cherchant à communiquer avec nous malgré la barrière de la langue, en nous nourrissant de leur mets succulents et un peu épicés, en faisant la lessive pour nous, en nous bousculant dans notre manière de voir le monde et de vivre la vie, en nous faisant découvrir leur culture, leur foi, leur amitié. Qu’ils reçoivent toute notre gratitude ! Rencontrer ces personnes formidables a nourri notre foi en l’humanité.

Galerie d’images