Prédication culte du dimanche 3 mars à la collégiale de Neuchâtel


Textes bibliques : Rom 14, 1-8 et Gal 3, 26-28

Introduction
Aujourd’hui il est de bon ton de ne plus trop citer les références liées à un auteur, homme ou femme, qui serait imprégnés d’un référentiel chrétien. On cite plus facilement les humanistes, les philosophes anciens et nouveaux, les penseurs du monde contemporain d’une envergure universelle.
L’Église ne trouve plus vraiment sa place dans notre époque de religiosité souvent bricolée. Un étudiant l’autre jour déclarait : La superstition est multiple et la religion est un de ses aspects.
Je nous dis cela non pas pour nous faire peur, mais bien parce que je crois que le christianisme qui est une religion – qui par ailleurs à encore du succès, je lisais la semaine dernière, dans un éditorial du journal « Le Temps » au sujet des Iraniens, je cite : « il se dit que les conversions au christianisme se multiplient, malgré le crime d’apostasie. » Je nous dis cela aussi au sujet des deux textes bibliques de l’apôtre Paul que nous venons d’entendre. Le christianisme comme ces deux textes ont vraiment quelque chose à dire aujourd’hui à la société, au monde et plus particulièrement à chacun, chacune d’entre-nous. Mais quoi ? C’est ce que je souhaiterais vous dire ce matin, avec, bien évidemment, aucune prétention exhaustive, si ce n’est celle d’y croire.


L’exemple de la pédagogie chrétienne
Je prendrai d’abord l’exemple de la pédagogie chrétienne. Je saisis cet exemple moins pour l’enfant que pour la manière de permettre aux faibles, Calvin traduit par « débile » le grec asthéneia : « faiblesse de la nature humaine. » du texte qui nous concerne. Comme pour les enfants, il convient d’avoir en tête que l’autre, l’enfant donc, comme celui ou celle qui n’a pas notre privilège d’être là où nous en sommes dans notre cheminent chrétien, que d’aucune manière il nous est permis de manipuler, endoctriner une personne quelque qu’elle soit. Ou encore de tout faire pour lui enfiler l’habit du politiquement correcte, du prêt à penser.


Non l’apôtre Paul, nous invite à être tolérant, à respecter l’autre comme une personne qui chemine vers…, vers un accomplissement spirituel. Nous invite à mesurer en somme la capacité de chaque personne avec laquelle nous avons à faire, avec laquelle nous partageons, échangeons, disputons ; de mesurer sa capacité à construire sa personnalité avec pour référence ultime le Christ. Et de répondre à leurs questions seulement dans ce sens. Et jamais dans celui qui casserait en elle – donc la personne -, la résonnance de l’Autre, du tout Autre, toujours possible. Seulement dans sens dis-je, et non dans celui des guignols du wokisme par exemple. Ou de toute volonté d’imposer une manière de penser, de subvertir le langage dans la perspective de prendre un pouvoir indu. Qui es-tu pour juger un serviteur qui ne t’appartient pas » (Rom 14, 4), nous rappelle l’apôtre Paul.


De prendre un pouvoir complétement coupé – cancel culture – de son enracinement non pas seulement étymologique, mais surtout de son enracinement de « la constellation occidentale de la foi et du savoir. » pour reprendre le sous-titre du premier volume « D’une histoire de la philosophie » de Jürgen Habermas.


De la référence ultime
Et se pose alors, vous le devinez, la question de la référence ultime. Et un des moyen le plus efficace qui fait partie de la liberté de penser, d’une pensée critique, comme de celle d’oser débattre, c’est donc bien de toujours savoir d’où on parle et de qui on parle. Notre société semble empêtrée, à bout de souffle et un grand nombre de personne ne savent plus « à quel saint se vouer » comme on dit. Et une grande majorité quand ils savent à qui se vouer, cela fait peur. Très souvent du reste finalement, ce n’est qu’à soi-même que l’on fait référence.


Le texte de Paul à ce sujet est radical. Mais surtout il fait monter les tours de la rhétorique. « Celui qui tient compte des jour, le fait pour le Seigneur : celui qui mange de tout le fait pour le Seigneur. » (v. 6). Agir, penser, travailler, dormir, manger, se lever pour le Seigneur, voilà une manière vivre qui n’est pas banale ! Être soudainement résolu de marcher fier sur des chemins qu’on imagine sans cesse postpascals, résolu de défendre ses idée, sa référence ultime sous une charge d’éternité. Être une personne qui requalifie constamment dans son for intérieure, l’expérience de la résonance d’une autre référence que toutes celles qu’on nous balance à tort et à travers. J’emprunte cette expression de « résonnance » à un très bon petit livre du sociologue allemand Hartmut Rosa « Pourquoi la démocratie à besoin de la religion ». sept. 2023. En fait être en résonance c’est se laisser transformer. Mais pas par n’importe qui. Pas par n’importe quel écrit. Je vous laisse deviner par qui et par quel narration, par quelle verve poétique.


Être résolu, audacieux dans sa pensé, n’est-ce pas avoir la volonté, le courage, en toute circonstance, de d’abord, à priori se référer à Jésus-Christ ? À chaque fois où que l’on soit, quoi que l’on fasse, le laisser entrer en nous et s’Il en ressort s’en étonner. Ce que nous ne pouvons jamais faire, quand nous nous référons à toutes les cliques de la violence, de la perversité mentale a la rhétorique douteuse. Avez-vous déjà laissé entrer en vous de tels énergumènes ? Non j’en suis sûr !


Conclusion : en réf aux Gal 3, 26-28
Car en fait laisser entrer en nous la présence, la référence ultime que représente le Christ, c’est oser le baptême. Non nécessaire, puisqu’il est un sacrement qui vient en plus confirmer, témoigner notre attachement, ici et maintenant, à cette référence ultime. Oser le baptême un peu comme un désir de chaque fois se retrouver dans le jardin des Pâques de la résurrection.


Mais c’est aussi confesser que notre incorporation au Christ dans le baptême nous donne le privilège de devenir fils, fille de Dieu. Et à ce stade, comprendre que les frontières, les barrières, de races, de ségrégation, de genre, de classe, de Qi pratiqués, avancés par le monde, n’ont plus aucune pertinence. Car tous ces cloisonnements deviennent impropres à l’accomplissement de toute personne, portant ce joyau de la référence au Christ, impropre à la promesse du Royaume de Dieu.


En fin de compte, chers amis, alors que le propre d’une inflation de références actuelles est de nous perdre ou de nous anesthésié, moi, nous dans notre folie nous nous accrochons, hors de cette touffe de références, à la référence ultime qui déjà sur la croix, encore et toujours, fait fleurir l’arbre de vie. Amen.
Jean-Pierre Roth, 03.03.2024