« Quand le Seigneur aime quelqu’un, il lui donne de bonnes leçons »

Dimanche 24 août 2025 – temple de Rochefort – culte d’au revoir
Prédication à deux voix

Lecture:

Et vous avez oublié l’encouragement qui vous est adressé comme à des fils : Mon fils, ne prends pas à la légère la correction du Seigneur, et ne te décourage pas lorsqu’il te reprend.

Car le Seigneur corrige celui qu’il aime, il donne des coups de fouet à tout fils qu’il agrée.

C’est pour votre correction que vous endurez ; Dieu vous traite comme des fils.

Quel est en effet le fils que le père ne corrige pas ?

Toute correction, il est vrai, ne semble pas être au premier abord un sujet de joie, mais un sujet de tristesse ; plus tard, toutefois, elle procure à ceux qu’elle a formés un fruit de paix, la justice.

Redressez donc les mains qui retombent et les genoux qui flageolent. Préparez pour vos pieds des pistes droites, afin que ce qui est boiteux ne se torde pas davantage, mais plutôt guérisse.

Hébreux 12,5-7,11-13

Prédication

René:

   Eh bien, mes sœurs et mes frères en Christ, voilà un texte biblique qui ne nous brosse pas dans le sens du poil, à première vue !    Il faut savoir que ce texte que nous avons choisi de méditer a été écrit à des chrétiens vivant une situation éprouvante : ils vivent l’opposition à cause de leur foi, et le découragement les guette. C’est pour cela que les premières paroles sont importantes à garder à l’esprit :

   « Vous avez oublié l’encouragement qui vous est adressé comme à des fils ». Un encouragement donné, quelle bonne nouvelle ! Encore faut-il enlever une grosse épine au texte qui suit, parce qu’elle m’a fait sursauter – je ne sais pas vous : « … le Seigneur donne des coups de fouet à tout fils qu’il agrée. »

On ne parle pas ici d’un thé au citron avec du gingembre à boire le matin, qui nous donne « un coup de fouet » pour la journée ! Quelle que soit la traduction que nous avons trouvée, il y a un mot, une expression qui nous heurte, qui ne correspond pas à notre manière de voir le Seigneur nous corriger.

   Ici, l’auteur de l’épitre a ajouté cette expression terrible à une citation du livre des Proverbes, que je vous livre dans la traduction de la TOB : « Ne rejette pas, mon fils, l’éducation du Seigneur, et ne te lasse pas de ses avis. Car le Seigneur réprimande celui qu’il aime tout comme un père le fils qu’il chérit. » Il semble que les coups de fouet appartiennent à l’éducation donnée à l’époque du rédacteur de l’épitre. Respirons ! et gardons plutôt en mémoire le reste de notre texte.

   Notons d’abord que nous sommes le fils, la fille que Dieu aime. Dans notre situation présente, cela peut nous paraître évident. Mais c’est dans TOUTE situation que le Seigneur se dit notre père aimant.

   J’aimerais méditer ce texte d’un point de vue personnel : chacune et chacun de nous vivant, tôt ou tard, une épreuve dans laquelle nous nous sentons découragés, peut-être abandonné par Dieu.

   Personnellement, je n’ai pas encore vécu une telle épreuve, ou alors pas très longtemps ni très durement. Ce que je vis pour l’instant, c’est ce que j’appelle l’école de la vieillesse : l’apprentissage de faire avec les forces qui diminuent, avec l’indépendance qui se rétrécit, etc. Et je comprends de mieux en mieux ces phrases qui me paraissaient couler de source : « On est heureux de pouvoir se lever le matin ; tant qu’on a encore sa tête ; tant qu’on peut se débrouiller par soi-même. »

   Mais les personnes qui, telles Job, vivent une épreuve qui les foudroient ? Comment ne pas alors crier à l’injustice ? Comment ne pas douter ? Jésus lui-même a crié à Dieu sur la croix : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » ! Il ne faisait pas que citer le début du Psaume 22, ce cri sortait de ses tripes à ce moment-là !

   Aux personnes qui sont dans la vallée de la mort, du deuil, de la maladie crucifiante, je ne lirais pas ce texte parce que je pense qu’il ne convient pas à leur situation de souffrance. D’abord, je ne peux que les écouter exprimer ce qu’elles endurent ; et parfois viennent ces « pourquois » et ces « si Dieu existe, pourquoi ? » auxquels je ne vais pas répondre directement.

   Car une parole qui tenterait d’expliquer ressemble à un pansement sur une plaie ouverte. Il faut d’abord l’écoute en silence, un silence priant si on veut ; un silence croyant aussi. Mais l’accueil respectueux de l’épreuve qui m’est confiée. C’est dans cette attitude que je me sens proche du Dieu aimant son fils, sa fille. Si, au cours de l’entretien, ou plus tard, je peux dire à la personne que je la porte dans ma prière, et que je la crois aimée par Dieu, je le fais.

   Mais c’est à la personne de ressentir, quand le moment viendra, qu’elle n’a pas été abandonnée par Dieu, et qu’elle a peut-être appris quelque chose par ce qu’elle a vécu. Quand une personne me dit, avec ses mots, son cheminement à travers son épreuve, et qu’elle peut en voir un sens pour sa vie, j’en rends grâce à Dieu.

   Notre texte ici nous parle d’une correction qui procure à ceux qu’elle a formés un fruit de paix, la justice – ou un fruit de paix et de justice. Bienheureuses les personnes qui arrivent à connaître la paix dans leur épreuve, à un moment ou à un autre, comme une ouverture de lumière dans la traversée d’un tunnel. Bienheureuses également les personnes qui parviennent à être sensibilisées par leur épreuve à l’injustice qui frappe tant de gens, au près et au loin.

   C’est un conseiller du CSP qui nous avait dit, quand nous traversions une épreuve face à l’AI :

« Si vous vous en sortez, vous comprendrez mieux les personnes qui vivent dans la précarité. » Cette parole était forte et vraie : nous avons mesuré à quel point le dénuement peut transformer une vie en un terrible parcours du combattant. Même si on s’en sort, on n’est plus le même ; on a perdu une assurance, une légèreté par rapport à la vie, à la société ; on a perdu notre naïve confiance en un Etat providence, etc.

   Aujourd’hui, gardons cet encouragement : dans l’épreuve, quelle qu’elle soit, Dieu reste présent et aimant comme un père pour tous les vivants.    Pour nous, que cette assurance nous aide à relever notre courage, à fortifier notre marche. C’est principalement par notre vie que nous témoignons que Dieu nous corrige, nous forme.

Amen.

Bénédicte:

Aujourd’hui marque l’obligation de se soumettre à une nouvelle épreuve.

René nous quitte.

Il s’en retourne à sa vie de retraité, pour apprécier les saveurs et les couleurs de ce temps béni, mais sous d’autres cieux.

Vraiment, merci René.

Et nous voici, nous, comme abandonnés de nouveau, livrés à nous-mêmes. Elle va nous manquer cette figure de bon berger aux bras d’une telle amplitude que lorsqu’ils s’écartent on se sent comme engloutis dans un cocon de coton.

Vraiment, pour tous les temps forts vécus en ta compagnie, merci René !

Ainsi donc, notre paroisse vit une nouvelle épreuve, mais pas que du fait du départ de René. Vous le savez sans doute, notre Église se transforme à nouveau, et depuis ce mois d’août elle dote notre paroisse d’un seul poste au lieu des deux que nous avions jusqu’ici. Un poste que Diane et moi nous nous partageons avec l’ambition de vous accompagner au mieux de ce que nous pouvons.

Et dans ce temps d’épreuve, nous sommes appelés, toutes et tous, à nous souvenir que nous sommes et restons enfants de Dieu.

A ce titre, nous avons à être éduqués. Et qui dit éducation dit également apprentissage, et parfois apprentissage dans la souffrance.

Durant tout son ministère, le Christ marche sur notre terre avec à sa suite une foule de disciples. Ils veulent découvrir, recevoir, apprendre et pratiquer une nouvelle intensité de vie.

Ils se laissent alors éduquer par ce qu’ils voient et perçoivent de Dieu au travers du message et des attitudes du Christ, lequel se dirige lui aussi inexorablement vers l’ultime épreuve, l’ultime souffrance, le supplice de la croix.

La souffrance, l’épreuve, n’épargne personne. Notre texte la compare à des coups de fouets. On nous dessine dans ce texte une méthode pédagogique qui emploie, à nos yeux, une forme de barbarie. Pour nous, aujourd’hui dans notre manière de comprendre l’éducation reste, sans aucun doute quelques coups de fouet par-ci par-là malheureusement, mais ne reste plus qu’un proverbe qui dit « qui aime bien châtie bien ! »

Dans l’Église, si aujourd’hui le message ne fait plus référence à des concepts théologiques impliquant la punition, elle clame en revanche la présence de Dieu dans nos épreuves qui de ce fait peuvent être comprises comme des occasions de croissances.

Le texte dit encore : quel est le fils que le père ne corrige pas ? Ainsi, l’épreuve n’est pas à comprendre comme le signe de l’absence de Dieu, mais plutôt comme celui de son implication dans le monde et dans ma vie. Je lui suis si importante qu’il s’engage à me façonner, à m’éduquer, à me montrer le droit chemin. Dieu n’est pas un Dieu indifférent, il me traite comme son enfant, il m’éduque car il veut me voir grandir et grandir sur les sentiers de sa justice.

Alors il m’est permis de comprendre l’épreuve non pas comme une punition mais comme une invitation à grandir. Car s’il ne s’agit pas d’une punition, comprise comme une malédiction ou un empoisonnement de mon existence, alors je peux me poser la question de la leçon que je pourrais en tirer. Et c’est alors que mon épreuve peut porter du fruit.

La leçon, dans une épreuve et avec une certaine douleur, change notre manière de voir. Et le changement nous rend différents…  Nous en retirons alors un enseignement pour notre manière d’être, de faire, de vivre…

Dans cette Épitre, cet enseignement sur les corrections a pour but de fortifier les destinataires du texte dans les épreuves qu’ils traversent. Il est plus facile d’affronter une épreuve quand on sait Dieu investi à ses côtés.

Et nous aujourd’hui, notre histoire, nos épreuves quelles qu’elles soient, comment les lisons-nous ?

Sommes-nous punis ? maudits ?

Une punition, une malédiction sont des impasses. Elles ne débouchent sur rien d’autre que la souffrance, la plainte et le néant.

Peut-être faut-il alors chercher à les lires sous un autre angle.

En ce qui concerne notre histoire « ERENienne » commune, là encore peut-être serait-il bon de ne pas nous lamenter et de nous positionner en victimes. Il est vrai que pour les Eglises traditionnelles les temps sont durs. Il est vrai que notre société se déchristianise, il est vrai que nos membres payent de moins en moins leur contribution ecclésiastique, il est vrai qu’il y a de moins en moins de vocations. Mais si nous en restons à ce constat et le comprenons comme une malédiction, nous ne pouvons qu’avoir mal et pleurer.

En revanche, si nous le comprenons comme une invitation à en tirer une leçon, comme un appel à l’endurance, alors nous pouvons tous ensemble nous remettre debout, retrousser nos manches, et chercher à tirer des fruits de notre traversée.

L’enseignement sur l’épreuve est pour notre Église, notre paroisse, notre vie, un encouragement, car il nous donne l’assurance que dans nos épreuves, nous ne sommes pas abandonnés de Dieu. Redressons-nous, activons-nous et marchons ensemble sous le regard de celui qui nous aime comme un Père.

Amen

Confession de foi:

Je choisis Dieu !
Il invente la vie.
Il nous remplit de tendresse.
Il s’intéresse à la terre.
Il se lie d’amour avec les vivants.
Ce Dieu-là me passionne !

Je choisis le Christ !
Il avance au milieu de nous
avec un cœur et un corps de chez nous.
Il a des paroles bouleversantes
qui inventent une autre vie.
Il annonce un Evangile de bonheur.
Il se donne par amour.
Ce Christ-là me passionne !

Je choisis le Saint-Esprit !
Il est le souffle de Dieu sur la terre des hommes.
A l’intérieur de nous-mêmes il travaille,
invisible, mais fort.
Il invente en nous
le courage de marcher sur les chemins difficiles.
Il nous fait grandir à l’image du Christ.
Cet Esprit-là me passionne !

Je choisis l’Eglise !
Elle est le rassemblement
de tous ceux qui inventent une terre d’amour
en prenant les plans de l’Evangile.
Cette Eglise-là me passionne !

Amen