Retrouver sa route.

Elim: Claude Fiaux, Pierre Reverchon, Hans Beck, Bénédicte Gritti

Aujourd’hui, Elim vous emmène dans les méandres du remord. Lorsque vous ne vous sentez plus digne de confiance et que vous cherchez votre route avec l’espoir de rencontrer quelqu’un qui saura vous orienter.

Voici les réflexions de Hans Beck sur le récit de l’apparition de Jésus aux disciples telle que relatée dans le chapitre 21 de l’Évangile de Jean:

C’est surtout l’entretien entre Jésus et Simon Pierre dans le verset 15 qui est intéressant et émouvant :

« Après qu’ils eurent mangé, Jésus dit à Simon Pierre: Simon, fils de Jonas, m’aimes-tu plus que ne m’aiment ceux-ci? Il lui répondit: Oui, Seigneur, tu sais que je t’aime. Jésus lui dit: Pais mes agneaux ».

Simon Pierre venait de traverser une crise morale d’où il doit sortir complètement guéri. Il est vrai que sa repentance profonde avait commencé son relèvement. Mais ses rapports avec le Sauveur, profondément troublés par son reniement, devaient être rétablis en leur entier.

Tel est le but de Jésus, dans cet entretien. Il fait subir à son disciple un examen de conscience et de cœur que celui-ci n’oubliera jamais. Jésus ne l’interroge pas sur sa foi, qui n’avait pas défailli, grâce à l’intercession du Sauveur; mais sur son amour, qui était devenu suspect par son infidélité.

Or, l’amour du Sauveur est l’âme de la vie chrétienne et de tout apostolat véritable. Ce n’est donc pas sans intention que Jésus ne désigne pas son disciple par le nouveau nom qu’il lui avait donné, celui de Pierre, ou de Céphas, Roc; mais par son ancien nom : Simon, fils de Jona, qui rappelait à son disciple son état d’homme naturel et de pécheur.

Quelques exégètes ont prétendu que cette appellation répétée n’avait d’autre but que de donner plus de solennité à l’entretien ; mais l’opinion que nous venons d’exprimer est également soutenue par d’autres inter­prètes.

Toutefois, si la question de Jésus pouvait être humiliante pour son dis­ciple, elle prouve que Jésus n’avait point cessé de l’aimer ; c’est l’amour qui recherche l’amour. Et c’était là, en même temps, la manière la plus délicate d’assurer Pierre qu’il lui pardonnait son coupable reniement.

Il y a, dans la question de Jésus, un mot qu’il faut bien remarquer : M’aimes-tu, plus que ne font ceux-ci? C’est-à-dire plus que tes condis­ciples présents à cet entretien.

C’était là une allusion évidente et humiliante pour Pierre, à sa parole pré­somptueuse.

Puisqu’il s’y était ainsi engagé, Pierre devait l’aimer plus que tous les autres.

Pierre, sûr de sa sincérité, affirme résolument son amour pour son Maître. Mais on remarque, dans sa réponse, trois restrictions impor­tantes. D’abord, instruit par sa triste expérience, se défiant de lui-même, il en appelle à Celui qui seul connaît son cœur et peut juger de son amour : Tu sais que je t’aime.

Puis, tandis que Jésus en lui disant : M’aimes-tu ? se sert d’un verbe qui désigne l’amour profond et religieux de l’âme, Pierre emploie un terme qui signifie l’affection du cœur, sentiment purement humain, n’o­sant pas affirmer plus que cela.

Enfin, il se garde bien de se comparer avantageusement à d’autres, et il ne relève pas ces mots : plus que ceux-ci. Sa chute et sa repentance ont produit l’humilité.

Dans le texte grec il est dit: « Mes petits agneaux ».

Il y a dans cet original un gracieux diminutif qui trahit une grande ten­dresse, un cœur ému en faveur de ceux que Jésus désigne ainsi. Et par là, il recommande avant tout aux soins de son disciple les petits et les faibles, ceux qui, comme lui, étaient exposés à tomber.

Par ces paroles et par celles qui vont suivre, il est évident que Jésus ré­intégrait son disciple dans ses rapports avec lui et dans son apostolat.

Quelques exégètes n’admettent pas qu’il s’agisse de la réintégration de Pierre dans l’apostolat, attendu qu’il avait déjà été réhabilité avec tous ses condisciples par la parole de Jésus, et que l’apostolat n’est jamais comparé à l’office d’un berger.

Le but de Jésus serait donc de replacer Pierre dans sa position de chef de la communauté chrétienne. Mais cette dernière pensée ne ressort point de notre récit, et il nous paraît évident que Pierre, profondément déchu par son reniement devait être personnellement relevé devant tous et à ses propres yeux, et rétabli d’une manière particulière dans sa di­gnité d’apôtre de Jésus-Christ.

Ainsi en va-t-il de chacun d’entre nous qui faillons dans notre amour pour le Christ. Nous avons, nous aussi, besoin d’être sans cesse pardonnés et redirigés. Et le Christ, par son amour inconditionnel nous relève toujours pour que nous puissions continuer d’avancer sur le chemin de nos vocations individuelles et communautaires. A chacun il redonne sa dignité.