Dieu, ma forteresse!

Ce matin, dimanche 2 octobre, nous avons emprunté le sentier qui mène aux vestiges du château de Rochefort en méditant trois versets tirés de psaumes que voici:

Le Seigneur est pour moi un roc, un refuge où je suis en sûreté.
Mon Dieu est pour moi un rocher où je suis à l’abri du danger,
un bouclier qui me protège, une forteresse où je suis sauvé.
PS 18, 3

Le Seigneur me protège, il est mon bouclier.
Du fond du cœur, je lui ai fait confiance ;
j’ai reçu du secours, j’ai le cœur en fête !
Je chante ses louanges.
Ps 28, 7

Goûtez et voyez combien le Seigneur est bon.
Heureux celui qui trouve refuge en lui !
Ps 34, 9

Puis nous nous sommes rassemblés entre les murs du château et avons entendu ce qui suit:

Durant les premiers temps de ce culte, nous avons pu nous imprégner des paroles fortes du Psalmiste, confessant combien Dieu était pour lui une place forte où il fait bon se réfugier en temps de troubles.

Durant les temps de marche silencieuse, peut-être vous êtes-vous demandé si pour vous également Dieu était cette place forte. Ou bien peut-être avez-vous pu vous remémorer certaines expériences ?
Avons-nous déjà goûté à cette joie de se sentir en sécurité dans le sein de Dieu, à l’image du psalmiste ?

Puis nous voici arrivés au pied de ce château de Rochefort.

Et là, il faut bien l’avouer, tout s’écroule. En guise de place forte, c’est devant des ruines que nous nous retrouvons. Et cette joie qui enflait dans nos cœurs vaillants sur le sentier qui nous a mené jusqu’ici, que devient-elle face à ces ruines ?

Des ruines…

Un château en ruine … , c’est qu’il a fini par succomber aux attaques !
C’est qu’il n’était pas assez fort, robuste !
C’est qu’il a fini par subir les affres du temps !
C’est qu’il a été abandonné, livré aux intempéries, aux pillards !

Et je ne peux m’empêcher de me demander : Et de ce Dieu forteresse, qu’en est-il vraiment ?

Vraiment ? a-t-il toujours été à mes côtés ?

Dans les épreuves de ma vie, Dieu a-t-il toujours été un refuge pour moi ? Ou bien à l’image de ces ruines du château de Rochefort dois-je me résigner à accepter que certaines fois, en guise de refuge, ce sont des ruines que Dieu m’a présentées ?

Si je reprends les versets que vous avez reçus, il y a cependant quelque chose qui me frappe dans ces affirmations.

J’y vois un double mouvement. Il y a bien sûr, Dieu qui se présente à David (à qui l’on attribue les psaumes) comme un roc, une forteresse, c’est ce que j’appellerais le premier mouvement.

Mais il y en a un second, plus discret et pourtant bien présent. C’est celui de David en direction de Dieu. Il lui accorde toute sa confiance, de tout son cœur il lui a fait confiance, dit-il.
Puis plein de joie, il chante ses louanges, et dans le troisième extrait, il invite ses auditeurs à le goûter et à tourner leur regard vers ce Dieu protecteur.

Il s’agit donc bien d’une relation qui va dans les deux sens.

Dieu se veut protecteur, un abri sûr et solide pour tous ceux qui chercheront refuge auprès de lui. Mais il faut s’y rendre. Il faut marcher vers ce Dieu qui nous ouvre les bras, marcher vers ce Dieu pour se mettre à l’abri sous son bouclier.

Alors quand je regarde les ruines qui se trouvent sur les chemins de mon existence, je me demande si vraiment j’ai fait ma part de chemin. Avais-je assez confiance dans les temps d’épreuve pour marcher vers la forteresse ? Est-ce que vraiment je portais du crédit à ce Dieu refuge, ce Dieu bouclier ? Ou bien ai-je cherché d’autres protections telles que ma colère, mon envie de vengeance, l’oubli ou encore la fuite ?

Il y a des ruines dans ma vie, et peut-être ai-je trop vite, moi-même, abandonné le château, le délaissant, le fragilisant par mon absence. Dieu aurait-il pu me tourner le dos dans les épreuves qui me laissent un goût de ruines ? Ou bien est-ce moi qui me suis éloignée de lui, l’abandonnant à son attente de me voir le rejoindre ?

Nos vies sont parsemées de temps difficiles, de temps d’épreuves qui nous fragilisent, nous désarment, nous réduisent à de petites créatures sans force, épuisées et parfois totalement vidées. Alors nous nous croyons seuls, abandonnés, oubliés de ce Dieu qui s’était pourtant toujours dit à l’écoute et proche de ses enfants.

Écoutons à présent le texte de l’Exode :

Les Amalécites vinrent attaquer les Israélites à Refidim. Moïse dit à Josué : « Choisis des hommes capables de nous défendre et combats les Amalécites. Demain je me tiendrai au sommet de la colline, avec le bâton de Dieu à la main. »

Josué partit combattre les Amalécites, comme Moïse le lui avait ordonné, tandis que Moïse, Aaron et Hour se postaient au sommet de la colline.

Tant que Moïse tenait un bras levé, les Israélites étaient les plus forts, mais quand il le laissait retomber, les Amalécites l’emportaient.

Lorsque les deux bras de Moïse furent lourds de fatigue, Aaron et Hour prirent une pierre et la placèrent près de Moïse. Moïse s’y assit. Aaron et Hour, chacun d’un côté, lui soutinrent les bras, qui restèrent ainsi fermement levés jusqu’au coucher du soleil.

Josué remporta une victoire complète sur l’armée amalécite.
Exode 17, versets 8 à 13

Les hébreux sont en chemin vers la terre promise. Arrivés à Rephidim, ils se levèrent contre Dieu parce qu’ils souffraient de la soif. C’est alors que sous l’ordre de Dieu, Moïse fit s’écouler l’eau de la roche pour que le peuple puisse se désaltérer.
Puis un autre problème survint. L’attaque des Amalécites.

Josué reçut l’ordre de partir au combat tandis que Moïse se tiendrait sur le sommet de la montagne pour prier et tenir levé le bâton de Dieu. Celui-là même qui lui avait permis d’ouvrir la mer rouge. La main et le bâton levés, la victoire semble s’annoncer. Les hébreux ont le dessus dans la lutte contre les Amalécites.

Mais Moïse se fatigue.
D’épuisement, il finit par baisser la main. Et là, les ennemis en profitent et prennent le dessus à leur tour.

Voyez-vous ce que je vois ?
Je vois le même mouvement que dans nos psaumes de tout à l’heure.

Dieu est là, accordant son soutien. Moïse est là, participant à l’événement de toute sa force et de tout son cœur renforcé par la confiance qu’il place en son Seigneur.
Il y a donc là encore complicité, collaboration pour que l’issue soit favorable au peuple de Dieu.

Tout comme dans les psaumes, il y a ce double mouvement entre Dieu qui veut être refuge et le psalmiste qui avance vers son Dieu avec la foi dans les entrailles, et Moïse qui livre bataille encouragé et soutenu par son Dieu.

Mais voilà que Moïse fatigue. Il baisse les bras et plus rien ne va.

Dans nos vies également, combien de fois baissons-nous les bras d’épuisement. La force venant à manquer, il n’est plus possible de continuer le combat. Et alors tout semble perdu.
L’assaillant prend le dessus. Et nous de nous sentir abandonnés.

La suite du texte est encourageante cependant. Moïse prit de fatigue trouve l’aide nécessaire auprès de ses amis pour poursuivre le combat. Il revient sur le devant de la scène, mais il n’est plus seul. Aaron et Hour lui viennent en aide. Ils le font s’asseoir, et lui soutiennent les bras pour qu’il puisse les garder levés jusqu’au coucher du soleil et ainsi assurer la victoire à son peuple.

Oui, je trouve cela encourageant car il est vrai que la fatigue dans les temps d’épreuve nous prend, indépendamment de notre volonté bien souvent, nous laissant croire que Dieu se détourne de nous.

Or, à l’image de Moïse, Aaron et Hour, nous devrions nous souvenir que de l’aide peut nous être apportée par la communauté dans laquelle nous vivons, quelle qu’elle soit.

Trop souvent nous reléguons la vie de foi à la sphère privé et secrète, oubliant qu’elle est le liant entre les croyants que nous sommes. Entre les frères et les sœurs que nous sommes, toutes et tous associés à la victoire que Dieu souhaite pour nous.
C’est en nous souvenant que nous formons un même peuple, une famille, celle des enfants de Dieu, que nous pouvons retrouver les forces d’aller de l’avant dans l’adversité. Tous ensemble.

Et c’est alors aussi que les ruines qui nous guettent dans nos existences pourront se changer en forteresse.
Avec l’aide de Dieu. Et les uns avec les autres en route vers son refuge.

Amen.

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