C’est pas juste!

Du lever du soleil jusqu’à son coucher,
que le nom de Dieu soit béni.
Par la bouche des enfants et des nourrissons
que le nom de Dieu soit béni.
Par la vision des anciens et le rêve des adolescents
que le nom de Dieu soit béni.
Dans les salles du banquet céleste et dans les recoins de nos cœurs
que le nom de Dieu soit béni.
Que tout ce qui vit et respire loue le Seigneur.
Amen.

Petit livre des célébrations de Wild Goose Resource Group

Vous trouverez ici les textes du culte célébré le dimanche 6 septembre au temple de Rochefort. Que le partage de ces textes soit pour vous l’occasion de ressourcement.

Lectures bibliques

1 Alors j’ai pris en considération tout ce que j’ai vu. J’en ai conclu que Dieu seul a pouvoir sur la vie des justes et des sages comme sur leurs actions. Les hommes ne savent même pas s’ils connaîtront l’amour ou la haine. Ils ne peuvent rien prévoir. 2 Et c’est pareil pour tout le monde. La condition du juste et du méchant, du bon et du mauvais m est identique. A cet égard, il n’y a pas de différence entre celui qui accomplit les rites religieux et celui qui ne les accomplit pas, entre celui qui offre des sacrifices et celui qui n’en offre pas, entre celui qui se conduit bien et celui qui se conduit mal, entre celui qui fait des promesses à Dieu et celui qui n’ose pas en faire. 3 La condition humaine est la même pour tous et les conséquences qui en résultent sont désastreuses ici-bas : les humains se livrent au mal et ont des désirs insensés, ensuite il ne leur reste plus qu’à mourir. 4 Or seul celui qui est en vie peut encore espérer : un chien vivant vaut mieux qu’un lion mort n  ! 5 En effet, les vivants savent au moins qu’ils mourront, mais les morts, eux, ne savent rien du tout. Ils n’ont plus rien à attendre puisqu’ils sont tombés dans l’oubli. 6 Leurs amours, leurs haines, leurs jalousies sont mortes avec eux et ils ne participeront plus jamais à tout ce qui arrive ici-bas.
7 Alors, mange ton pain avec plaisir et bois ton vin d’un cœur joyeux, car Dieu a déjà approuvé tes actions. 8 En toute circonstance, mets des vêtements de fête et n’oublie jamais de parfumer ton visage. 9 Jouis de la vie avec la femme que tu aimes, chaque jour de la fugitive existence que Dieu t’accorde ici-bas. C’est là ce qui te revient dans la vie pour la peine que tu prends ici-bas. 10 Utilise ta force à réaliser tout ce qui se présente à toi. En effet on ne peut pas agir ni juger, il n’y a ni savoir ni sagesse là où sont les morts que tu iras rejoindre.

Ecclésiaste 9,1-10 (traduction français courant)

 

« Voici, en effet, à quoi ressemble le Royaume des cieux : Un propriétaire sortit tôt le matin afin d’engager des ouvriers pour sa vigne. 2 Il convint avec eux de leur payer le salaire habituel, une pièce d’argent par jour, et les envoya travailler dans sa vigne. 3 Il sortit de nouveau à neuf heures du matin et en vit d’autres qui se tenaient sur la place sans rien faire. 4 Il leur dit : «Allez, vous aussi, travailler dans ma vigne et je vous donnerai un juste salaire.» 5 Et ils y allèrent. Le propriétaire sortit encore à midi, puis à trois heures de l’après-midi et fit de même. 6 Enfin, vers cinq heures du soir, il sortit et trouva d’autres hommes qui se tenaient encore sur la place. Il leur demanda : «Pourquoi restez-vous ici tout le jour sans rien faire ?» — 7 «Parce que personne ne nous a engagés», répondirent-ils. Il leur dit : «Eh bien, allez, vous aussi, travailler dans ma vigne.»

8 « Quand vint le soir, le propriétaire de la vigne dit à son contremaître : «Appelle les ouvriers et paie à chacun son salaire. Tu commenceras par les derniers engagés et tu termineras par les premiers engagés.» 9 Ceux qui s’étaient mis au travail à cinq heures du soir vinrent alors et reçurent chacun une pièce d’argent. 10 Quand ce fut le tour des premiers engagés, ils pensèrent qu’ils recevraient plus ; mais on leur remit aussi à chacun une pièce d’argent. 11 En la recevant, ils critiquaient le propriétaire 12 et disaient : «Ces ouvriers engagés en dernier n’ont travaillé qu’une heure et tu les as payés comme nous qui avons supporté la fatigue d’une journée entière de travail sous un soleil brûlant !» 13 Mais le propriétaire répondit à l’un d’eux : «Mon ami, je ne te cause aucun tort. Tu as convenu avec moi de travailler pour une pièce d’argent par jour, n’est-ce pas ? 14 Prends donc ton salaire et va-t’en. Je veux donner à ce dernier engagé autant qu’à toi. 15 N’ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mon argent ? Ou bien es-tu jaloux parce que je suis bon ?»

Matthieu 20,1-15

C’est pô juste

Dans une dizaine de jours, les vendanges vont commencer. Toute la région va soudain s’animer de cette ambiance particulière de labeur. Des petites mains vont s’affairer pour récolter grappe après grappe le fruit de la vigne patiemment soigné et observé jusqu’à maturité. C’est dans cette période particulière de l’année que nous voyons arriver des travailleurs saisonniers, certains pour la première fois, d’autres depuis des années et des années, parfois en famille.

L’autre jour, en regardant ces vignes dans lesquelles règnent encore un calme qui précède le temps des vendanges, j’ai repensé à ce texte de Matthieu. Et en le relisant, je n’ai pu m’empêcher de me dire: c’est quand même pas juste!

Non, ce n’est pas juste que ceux qui ont travaillé une heure seulement aient le même salaire que ceux qui ont œuvré toute la journée. Ce n’est pas juste que ceux qui se sont cassé le dos, qui ont coupé les grappes les unes après les autres ne reçoivent pas plus que ceux qui ont à peine eu le temps de suer. Ce n’est pas juste non plus de verser le salaire des derniers sous le nez des premiers. Tout cela n’est pas juste…

Et pourtant, en lisant le texte encore une fois, je me suis aperçue d’une chose intéressante. Lorsque le maître engage les premiers, il leur promet une pièce d’argent. Je ne sais pas ce que cela valait à l’époque, mais cette somme ne semble provoquer ni révolte ni louange, c’est le salaire habituel pour une journée de travail. Ensuite, lorsque le maître engage les nouveaux ouvriers, trois heures plus tard, il n’articule aucune somme d’argent, mais leur promet: « je vous donnerai ce qui est juste ». Ce qui est juste ! Ce que nous considérions comme injuste, c’est exactement ce que le maître affirme être juste. C’est bien que dans cette histoire, ce qui fait problème, c’est l’interprétation de ce terme: justice.

Le petit Robert la définit ainsi: juste appréciation, reconnaissance et respect des droits et du mérite de chacun.

Si l’on parle de mérite, il faut affirmer que le maître a été injuste puisqu’il paie de la même manière celui qui a travaillé une heure et celui qui a sué toute la journée. Ce dernier est certainement plus méritant. Quoique, on ne sait pas si les autres ont cherché du travail toute la journée sans succès ou si ils se sont abandonnés à l’oisiveté. Le texte dit simplement qu’ils n’ont pas travaillé parce que personne ne les a embauchés. Peut-être qu’eux aussi sont très méritants finalement, mais ce qui est certain, c’est que pour le maître, ils ont été bien moins productifs que les précédents.

La question de la justice est finement liée à celle de la comparaison. Le salaire des premiers ouvriers est injuste comparé à celui des derniers. Dans l’absolu, ce salaire est juste puisqu’il correspond au contrat de départ entre le maître et les travailleurs. Mais ce même salaire semble tout à coup injuste lorsqu’on sait que le maître a offert la même somme aux suivants.

On ne peut échapper à cette comparaison, puisque le salaire des derniers est versé en premier et sous le nez des ouvriers de la première heure. La parabole nous pousse à nous poser cette question de la justice en comparaison, de la justice en relation: il nous pousse à nous poser la question de l’éthique.

Nous sommes des êtres humains, des personnes en relations, et nous ne pouvons nous empêcher de nous comparer, de relativiser les choses par rapport aux autres personnes. Et on ne peut finalement que constater que la vie est injuste. C’est le constat que fait l’auteur du livre de Qoeleth, l’Ecclésiaste. La vie est injuste. Ceux qui s’engagent corps et âme dans une vie religieuse ne sont pas plus gâtés que les mécréants, les gens biens ne sont pas épargnés les maladies cruelles, et les salops ne souffrent pas plus que les autres. C’est vrai, non ?!

L’issue est la même pour tous: la mort. Ce constat amer pourrait nous appeler au désespoir. A quoi bon continuer si la vie est injuste, si nos efforts ne servent à rien, si je ne m’en sors pas mieux si je suis une personne bonne? Pourtant, l’auteur de ce livre ne s’engouffre pas dans la déprime. Au contraire, il invite à aimer la vie. Puisque celle-ci est parfois injuste, puisqu’il peut arriver des tuiles à tous, puisque nous terminerons tous en poussière, profitons de ce qui nous est donné. Mangeons notre pain avec plaisir et buvons notre vin d’un cœur joyeux. C’est un regard résolument positif qui émerge d’une vision du monde particulièrement noire.

Ce regard positif, j’aimerais le poser sur le texte de Matthieu. Je cesse tout d’abord de me mettre à la place des premiers ouvriers pour m’identifier aux derniers. C’est finalement assez prétentieux de se poser en bons élèves, alors que peut-être notre place est-elle plus avec celle des cancres. Je découvre alors le bien que cela fait de recevoir autant alors que j’ai l’impression d’avoir peu donné. Une seule heure de travail et une belle pièce d’argent. Une récompense inattendue et valorisante pour celui qui se pense inférieur aux autres.

Ensuite, je réfléchis au plaisir du maître d’offrir un peu de sa fortune à tous ses ouvriers, comme un grand-père qui prépare des enveloppes à Noël pour ses petits-enfants. Il met la même somme à tous, dans un souci de justice. Mais est-ce vraiment juste d’offrir le même billet à un ado de 15 ans et à un petit garçon de 6 ans? Toujours cette question de la justice et de la comparaison…

Et finalement je relis la dernière question du maître: «ou alors es-tu jaloux parce que je suis bon?». Voilà peut-être qu’il touche juste. Peut-être que ce qui m’est contraire dans cette histoire ce n’est pas qu’il donne beaucoup aux derniers, mais plutôt qu’il ne fasse pas preuve de cette même générosité envers les premiers. Peut-être qu’il aurait pu donner quelque chose en plus à ceux qui ont trimé dur. Une prime. Mais il n’est pas ici question de générosité. Le maître ne cède pas à un élan de bonté, il agit selon ce qu’il estime juste. C’est sa justice à lui. Et celle-ci remet en question mes attentes par rapport à la justice.

Ici, le problème n’est pas que quelqu’un a été lésé, puisque les premiers ont obtenu le salaire pour lequel ils avaient été embauchés. Non, le problème est que certains ont reçu plus et c’est cela qui me dérange. C’est assez terrible car cela touche en moi quelque chose dont je ne suis pas fière: ma jalousie. Ne suis-je pas capable d’accepter les bonnes choses qui arrivent aux autres? Pourquoi cela me dérange-t-il alors que cela ne me lèse en rien?

Voilà des questions que me posent ce texte et avec lesquelles il faudra certainement que je me batte un moment.

Mais revenons encore au tout début du texte: «Le Royaume des cieux est comparable à un maître de maison qui sortit de bon matin…» Il ne faut pas perdre de vue que cette parabole nous parle du Royaume. Dans le Royaume des cieux règne donc la justice. La justice du maître. La justice de Dieu. Elle qui me pose encore grand problème et qui m’appelle à accepter la grâce non seulement pour moi, mais aussi pour les autres. Que cela me plaise ou non, la promesse de la grâce est aussi adressée à celles et ceux qui me semblent moins méritants que moi.

Ce n’est pas moi qui gère la fortune du maître, c’est bien lui qui fait ce qu’il veut de son bien. Et c’est lui qui, heure après heure, sort de sa vigne pour venir nous chercher et nous offrir ce qu’il estime juste. Il fait ce qu’il veut de son bien, de sa grâce et notre travail d’ouvriers est d’apprendre à l’accepter.

Amen

Intercession

Seigneur, apprends-nous la patience.
Quand nous ne voyons pas immédiatement le résultat de nos actions.
Quand nous peinons à distinguer ta présence dans notre monde.
Quand nous voudrions récolter juste après avoir semé.
Apprends-nous à attendre.
Des jours et des nuits…

Seigneur, fais naître en nous la confiance.
Donne-nous d’agir de telle manière que nos actes te soient offerts.
Donne-nous de croire que tu sauras les porter mieux que nous.
Donne-nous d’espérer que ton mystère opère.

Ne nous laisse pas gagner par le découragement
face aux obstacles si nombreux contre lesquels butte notre espérance.
Ne laisse pas nos cœurs se crisper sur la jalousie, mais donne-nous de nous réjouir des bénédictions que d’autres reçoivent.

Soyons joyeux pour les jeunes époux, heureux pour celles et ceux qui ont décroché un nouveau travail, ravis pour les succès emportés, contents pour les beautés, les richesses, les exploits qui ne sont pas les nôtres.

Donne-nous de croire encore et encore qu’en toute circonstance et malgré l’adversité, ton Règne grandit.
Et que sans cesse tu renouvelles nos forces pour œuvrer à son avènement.

Amen

Bénédiction

Que la joie de Dieu vous habite
Que sa bonté touche vos cœurs
Que son amour vous fasse vivre de sa justice.

Dieu vous bénit et il vous garde.
Lui qui est Père, Fils et St-Esprit. Amen