Sous l’Ancienne Alliance, Osée 8,7 dit ceci :

Puisqu’ils ont semé du vent, ils moissonneront la tempête. Ils n’auront pas un épi de blé. Ce qui poussera ne donnera pas de farine, et s’il y en avait, des étrangers la dévoreraient.

Et dans l’Evangile de Jean 5,24-29 voici ce que nous lisons :

En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui écoute ma parole et qui croit à celui qui m’a envoyé a la vie éternelle ; il ne vient pas en jugement, mais il est passé de la mort à la vie.
En vérité, en vérité, je vous le dis, l’heure vient, et elle est déjà là, où les morts entendront la voix du Fils de Dieu, et ceux qui l’auront entendue vivront.
En effet, tout comme le Père a la vie en lui-même, ainsi il a donné au Fils d’avoir la vie en lui-même.
Et il lui a donné [aussi] le pouvoir de juger, parce qu’il est le Fils de l’homme.
Ne vous en étonnez pas, car l’heure vient où tous ceux qui sont dans les tombeaux entendront sa voix et
en sortiront : ceux qui auront fait le bien ressusciteront pour la vie, mais ceux qui auront fait le mal ressusciteront pour le jugement.

En ce dimanche des récoltes, beaucoup d’entre vous ont apporté des fruits ou des légumes de leur jardin ou du magasin. Je ne sais pas quelle signification cela a pour vous d’apporter ces choses ; personnellement, je l’ai fait en signe de reconnaissance, car tant de petites graines que j’ai plantées au printemps, ont germé ; une plante s’est développée, puis une fleur ou de multiple fleurs se sont épanouies et ont porté du fruit ; celui-ci a grandi jusqu’à produire de la nourriture qui pourra alimenter mon corps.

Je trouve toujours assez miraculeux d’observer comme une toute petite graine peut produire une plante avec des feuilles énormes, puis des fruits, tout ceci en l’espace d’une saison.

Vous n’êtes peut-être pas tous des férus de jardinage, mais une chose est claire, je pense pour chacun d’entre nous, une graine de haricot ne va pas donner une tomate.

Il y a une certaine logique entre ce que nous faisons et ce que nous récoltons. Si je sème des paroles agressives, dépourvues d’égards pour l’autre, je ne vais pas récolter de l’amour.

Osée utilise une image tirée de la météorologie pour nous faire réfléchir sur nos agissements : « Celui qui sème le vent, récolte la tempête ».

Il y a deux compréhensions possibles de ce dicton :

  • L’une qui est moralisatrice ; elle voit dans la tempête un châtiment divin, une sorte de foudre qui tombe sur ceux qui ont mal fait.
  • L’autre voit dans la tempête une conséquence naturelle de notre comportement. C’est nous qui l’avons provoquée. Par exemple, si je critique les autres, que je les dénigre, on va finir par m’enfouir sous les critiques et les paroles malveillantes.

Vous connaissez peut-être, dans la collection d’Astérix, le livre intitulé La Zizanie : on y voit un petit bonhomme malsain dispenser partout la discorde. Quand la Zizanie arrive, les gens qui s’entendaient bien sombrent immédiatement dans les disputes, ils emploient des mots qui font mal. C’est la mésentente, la guerre. La zizanie se répand, mais, à la fin du recueil, celui qui a provoqué la zizanie est rattrapé par celle-ci et c’est lui qui en subit les conséquences. En bonne morale, il récolte ce qu’il a semé. « Tel est pris, qui croyait prendre », comme on dit aussi !

Mais revenons à notre dicton : « Celui qui sème le vent, récolte la tempête ». On pourrait parler ici d’un effet boumerang. Il ne s’agit pas d’une rétribution lors du jugement dernier mais de conséquences directes liées à nos paroles ou à nos actes. Une sorte de répercussion naturelle.

Par exemple, les excès de vitesse, comme tous les excès, entraînent plus de risques d’avoir un accident, ou tout au moins une « prune ».

De même, celui qui veut s’enrichir par tous les moyens risque bien d’être la victime des autres qui veulent s’enrichir et qui vont s’en prendre à lui en cherchant à le piéger. Quand on cherche la richesse, on finit par être empoisonné soi-même par cette quête.

La question essentielle à nous poser est la suivante : en quel Dieu croyons-nous ? 

Quand Jésus parle du jugement dernier, il est pacifié. Contrairement à une idée reçue, Jésus présente le jugement dernier comme un moment qui nous révèle et non qui nous condamne.

On a trop tendance à s’arrêter à la notion de jugement. Le jugement est un peu naïvement perçu comme la foudre qui nous tombe dessus. Ou pire encore comme la foudre qui tombe sur les méchants, sur les autres. Par exemple, si qqn dit à un autre : « Je n’aimerais pas être à ta place quand tu seras devant le juge ! ».

Mais il existe une autre lecture possible de notre comparution devant Dieu, que ce soit maintenant déjà, dans ce monde, ou plus tard. C’est de considérer Dieu comme le plus proche de nos amis, qui commence par nous dire : « Je te comprends, je t’accueille, je t’aime, mais je te laisse regarder l’image de toi-même, parce que j’aimerais que tu deviennes toujours plus à mon image ».

Là, nous croyons à un jugement « révélation », qui se déroule dans l’accueil et la bienveillance. A ce moment-là, Dieu serait comme un grand conseiller de la récolte, qui dirait : « Tu vois toute la récolte qui t’est possible ! Tu peux faire mieux que dans le passé et éviter des traitements qui ne sont pas adéquats ». Donc un Dieu « ami » et « pédagogue », plutôt qu’un Dieu qui va nous foudroyer. C’est dans ce sens-là que le jugement a lieu déjà dans ce monde, selon ce que le Christ nous inspire.

« Amen, amen, je vous le dis, celui qui entend ma parole et qui croit celui qui m’a envoyé a la vie éternelle ; il ne vient pas en jugement, il est passé de la mort à la vie » (Jean 5,24).

Jean apporte une vision novatrice du jugement et de la vie éternelle. Le jugement a donc déjà lieu maintenant, dans le sens où Jésus commence à nous changer en nous aidant à passer des ténèbres à la lumière. Il fait cela en nous révélant qui nous sommes.

Personne ne peut pas dire : « moi je suis bon donc je suis du bon côté, alors que d’autres sont méchants donc ils sont de l’autre côté. Dans la réalité, on sait que nous sommes tous impliqués dans le mal ; de ce fait, nous sommes tous appelés à changer. « Nous sommes tous pécheurs », dit Paul, et nous avons tous besoin que le Dieu d’amour nous transforme à son image.

Dieu est un Dieu de profusion, qui fait germer, pousser, même à des endroits qui nous semblent impossibles. Il y a dans la nature une profusion et un excès qui nous rassurent sur la bonté de Dieu.

Il nous invite, au lieu de semer le vent, à semer une brise de… douceur, de bonté, de sérénité !


Nul n’est disciple hormis le serviteur.
Nul n’est lumière sans l’amour indicible qui, dans le frère, découvre le Seigneur.
Nul ne console à moins d’avoir souffert.
Nul ne témoigne, s’il ne vit la Parole où l’homme gagne sa joie, quand il se perd.
Nul n’est tendresse à moins d’être blessé.
Nul ne pardonne s’il n’a vu sa propre faiblesse.
Nul ne partage, s’il n’a donné son tout.
Nul ne peut dire la folie du message, s’il ne se livre lui-même jusqu’au bout.
Nul n’est semence à moins d’être semeur :
Point de récolte sans le temps du silence, car tout apôtre devient le grain qui meurt.
Toutes les chansons du monde dansent, dansent dans mon cœur:
la joie de vivre et les printemps,
la joie d’aimer, comme un torrent,
dansent, dansent dans mon cœur,
Seigneur, quand je viens te voir.
Pierre-Jean Ruff

 

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