Un 1er août sur l’alpage

Je ne sais pas comment vous avez vécu cette fête du 1er août. Personnellement, j’avais prévu de monter à la Tourne pour me joindre à la désormais traditionnelle torée organisée par la commune de Rochefort. Mais, cette année, pas de marche en haut des Rochers de Tablettes, pas de rassemblement à la Buvette du Grand-Coeurie. Alors quoi, rien ?

Peut-être que, comme moi, vous vous êtes installés en famille sur la terrasse pour profiter de l’agréable soirée estivale et vous avez été surpris et émerveillés de tous les feux d’artifice qui sont partis de chez vos voisins et qui ont malgré tout illuminé le ciel.

Contre toute attente, alors que, le lendemain, je faisais une marche en montagne avec quelques proches, nous avons été surpris, au restaurant de la Pierre-du-Moëllé – pour ne pas le nommer – où nous venions d’arriver, qu’une jeune fille propose de chanter spontanément quelques chants. Nous découvrons peu à peu sa voix limpide et claire, précise bien qu’a cappella.  Elle interprète quelques chants peu connus célébrant notre beau pays. Puis c’est l’hymne national suisse qu’elle entonne. Je n’ai malheureusement pas l’idée de l’enregistrer, tant je suis surprise de l’entendre.

 

Sur nos monts, quand le soleil5 par Charles Chatelanat (1833-1907).

Sur nos monts, quand le soleil
Annonce un brillant réveil,
Et prédit d’un plus beau jour le retour,
Les beautés de la patrie
Parlent à l’âme attendrie ;
Au ciel montent plus joyeux (bis)
Les accents d’un cœur pieux,
Les accents émus d’un cœur pieux.

Lorsqu’un doux rayon du soir
Joue encore dans le bois noir,
Le cœur se sent plus heureux près de Dieu.
Loin des vains bruits de la plaine,
L’âme en paix est plus sereine,
Au ciel montent plus joyeux (bis)
Les accents d’un cœur pieux,
Les accents émus d’un cœur pieux.

Lorsque dans la sombre nuit
La foudre éclate avec bruit,
Notre cœur presse encore le Dieu fort;
Dans l’orage et la détresse
Il est notre forteresse ;
Offrons-lui des cœurs pieux : (bis)
Dieu nous bénira des cieux,
Dieu nous bénira du haut des cieux.

Des grands monts vient le secours ;
Suisse, espère en Dieu toujours !
Garde la foi des aïeux, Vis comme eux !
Sur l’autel de la patrie
Mets tes biens, ton cœur, ta vie !
C’est le trésor précieux (bis)
Que Dieu bénira des cieux,
Que Dieu bénira du haut des cieux.

Comme souvent, on ne sait par coeur que la première strophe, mais cette jeune fille en connaît toutes les paroles. Lorsqu’elle en vient à chanter la troisième et la quatrième strophe, « Dieu nous bénira des cieux », avec cette répétition, cette insistance « Dieu nous bénira du haut des cieux », je suis émue. Je réalise que nous ne sommes pas à l’église; nous sommes dans ce lieu laïc, ce restaurant d’alpage et les gens se prennent au jeu de chanter avec elle des paroles engagées, engageantes. Chacun a le sourire, on entendrait les mouches voler, mais non, c’est la voix légère de cette jeune fille que nous suivons tous.

Ensuite, elle prend un chant de circonstances : Là-haut sur la montagne l’était un vieux chalet…

Elle aurait pu s’arrêter là, mais non, dans son élan, elle prend un chant que beaucoup ne connaissent pas, ou plus : la prière patriotique. Et vous, vous la connaissez ?

Le trio Suisse Chérie l’a enregistré pendant le confinement. Voici leur version, très émouvante :

Prière patriotique suisse.

Seigneur accorde ton secours
Au beau pays que mon coeur aime
Celui que j’aimerai toujours
Celui que j’aimerai quand même.

Refrain
Tu m’as dit d’aimer, j’obéis,
Mon Dieu protège mon pays. [bis]

Je l’aime pour ses frais vallons
Et j’aime d’un amour intime
La cime blanche de ses monts
Où plane l’aigle au vol sublime.

Il est ma force et mon appui
M’indique le chemin à suivre
Je l’aime et je dépends de lui
Ailleurs je ne pourrais pas vivre.

Dès que son nom est prononcé
Je sens tressaillir ma poitrine
Où son amour ensemencé
Au fond du coeur a pris racine.

Jadis, unissant leurs efforts,
Des gens d’ailleurs l’ont voulu prendre
Je le chéris d’autant plus fort
Que mes aïeux l’ont su défendre.

Et, pour terminer, elle prend ce chant bien connu : « Tout simplement »

Puis, elle nous remercie de l’avoir écoutée. Elle boit une grande lampée d’eau et elle part. Elle a un grand sac à dos, un bâton sculpté, de longues tresses et un foulard rouge. Elle me fait penser à Heidi. Elle s’en va sans même passer le chapeau, car, probablement, son but est ailleurs. Plus tard, nous la croisons alors qu’elle redescend de la Tour de Famelon et que nous y montons, le ventre plein. Je lui dis combien j’ai été touchée par son témoignage de foi, car plusieurs des chants qu’elle a choisis expriment l’envie que Dieu bénisse notre pays. Elle me dit spontanément qu’elle a chanté avec le choeur de sa paroisse et qu’elle a cette foi au fond d’elle qui la porte.

Je ne sais pas si vous aurez l’occasion de chanter votre foi tels cette jeune femme ou les troubadours d’autrefois, mais peut-être trouverez-vous une voie originale pour en témoigner d’une manière qui ne dérange pas, mais qui puisse toucher les gens d’aujourd’hui.

Alors, que Dieu vous bénisse et qu’il bénisse ce pays que mon coeur aime !